"Je suis entré dans la chambre de la rue Richelieu. Sianne était endormie.
J’ai soulevé la légère couverture. Elle était nue. Je me suis agenouillé en
tremblant devant ce long corps nacré, magnifique, dans toute sa nudité ;
le pubis adorablement soulevé par une petite touffe de poils frisés, le creux
du ventre étendu entre les deux légères courbes des hanches comme deux immenses
dunes enserrant la chaleur du sable au soleil. J’enfouis mon visage avec
d’infinies précautions pour ne pas l’éveiller et remontai mes lèvres jusqu’à sa
poitrine aux seins souples nimbés de rose et sa bouche qui souriait… Je me suis
dit que j’étais fou de songer à Elise… et pourtant dans la douce fureur qui me
prit je ne pouvais dissocier ce corps de
l’autre que j’imaginais plus fort, plus musclé, peut-être plus lourd mais que
dans mon délire je mêlais à nos jeux. Parfois dans le regard perdu de Sianne
j’avais l’impression qu’elle me devinait, qu’elle lisait ce que j’essayais de
voiler, le double bonheur qui m’étreignait.
Tandis qu’elle continuait sa
nuit, je me désenlaçai et sans bruit presque sans lumière j’écrivis pris
d’une sorte de vertige :
Je ne sais quoi tintait dans le chant des oiseaux,
Un vitrail brisé à coup de
pierre ?
L’éblouissement de la neige a
frappé mon regard,
Le nom de cette mer éclate que
j’ai perdu.
Pluie de nacre, de sel,
Les arbres tendaient leur force,
Et les mouettes rasaient l’écume
Alors, Tu naquis !
Ton corps vibrait au moindre frémissement de l’onde,
Tes muscles couraient désespérément contre mon cœur
Etouffant ses
derniers sursauts.
Ma main jouait au soleil avec tes doigts
Où luisaient des cascades et des pirogues
Comme la plaine, la nuit, se
répond à elle-même,
Je contemplais ton étonnement
Dans mon
étonnement
Où glissait le
silence
Encore, encore, ma Douce, ma Bien-aimée
Je t’attendrai au bord du Fleuve
Que vienne notre amour, que
nous partions encore !"
Extrait : Un jeune homme sans importance - Brûle tes vingt-ans ! de H.Zaphiratos -