UNE NUIT D’ETE
Les Trentenaires sont là avec leurs corps
gracieux et agiles. Adeline et Jean-Pierre, Isabelle et Dorian, Ibrahim et
Lucie. L’été est là, magnifique sur la baie. Les voiliers sont là. Le soleil
illumine l’océan du temps.
Hier
dans le petit restaurant au nom chanceux de « Baraka », la jeune
serveuse est passée près de nous, laissant apercevoir la beauté arrondie d’un
sein. Elle ne l’a pas voilée comme Sophie Marceau montant les Marches de
Cannes. Quand je lui ai dit « Vous avez un charmant avantage ». Elle
a souri et a m’a dit « merci », heureuse que dans l’anonymat d’une
foule de clients, quelqu’un ait remarqué sa délicatesse d’été. Une petite
seconde de bonheur entre elle et nous.
La foule a envahi les quais du port. Les
étalages de nuit sont illuminés sur des produits venus des quatre coins du
monde, comme il y a deux mille ans les débarcadères des ports grecs et romains.
Sous des palmiers éclatants on cause, des rires fusent. Des enfants à moitié
endormis passent, dans les bras de leurs pères. Les mamans suivent,
nonchalantes, le regard perdu sur les devantures de robes légères, de dessous
affriolants. Au-dessus du marchand de tabac et journaux, le losange rouge
flamboie. C’est une nuit d’été simple au bord de la mer.
Des skippers préparent leurs voiliers pour
la prochaine régate.
Nous avons repris la voiture après cette
douce soirée. Certains sont partis prendre le bain de minuit en abandonnant
leurs maillots, d’autres ont continué la fête dans une petite boîte aux
lampions, dans les pins. Nous avons suivi la route qui longe le bord de la mer.
Sur des kilomètres des ombres promenaient leurs rires et leurs jeux. Puis, nous
nous sommes glissés dans la nuit. Les sons lourds des sonos se fondaient dans
le vent léger.
M. s’était endormie. Son profil se dessinait
sous l’éclairage du tableau de bord. Je l’aimais pour tout ce que nous avions
vécu. Pour les jours gagnés et les jours perdus.
Là-bas, dans l’Orient profond, les jours et
les nuits ont toujours une couleur de sang.
Henry T. Zaphiratos
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