samedi 8 mai 2010

Les Cris, roman de Claire Castillon, Fayard Edit. 190 p. 2010, 16,90€

Ce roman : Des élucubrations qui prêtent à sourire et qui sont parfois chiantes. Comme l'écrivaine a écrit ce mot p.78, qu'il existe dans le dico, je ne vois pas pourquoi je ne l'emploierai pas.
Le prétexte : une rupture.
Disons plutôt qu'Adam,le nom convenu de l'amant, se barre, et que la narratrice qui se considère comme une femme "à la perfection invraisemblable"(p.8), "sans faille" en est toute retournée, d'autant que ce mec en est à son troisième largage. Alors vous devinez le choc "textuel" ! Et un monstre "textuel" s'empare de la narratrice ! Il l'engueule, mais elle résiste à ses "ordres", désobéit même à ce "textuel" de son bouquin pour aller chez le coiffeur ! C'est dire son drame !
A lire les 190 pages de ruminations, de colère artificielle de la narratrice, "Généralement à mon contact, l'homme tombe en dépression." p.85, on comprend que son Adam foute le camp. Mais qu'elle dit la dame : "Il revient toujours gratter à ma porte."(p. 87) Vous pensez, elle est si formidable !" Voilà Adam, me suis-je dit, il revient la queue basse, combien de temps déjà ?"(p.105).
A souligner le pathos style :"Ma langue s'allonge et je la porte en écharpe"(page.107).
La narratrice et son monstre "textuel" foncent dans une histoire abracadabrante. "Enervé, il(Adam) bande chouia. Mi-molle. Il essaie de pénétrer Valérie Merrieux, mais même avec les doigt serrés en anneau à la base de son membre, ça ne marche pas."(p.129). Et le monstre "textuel" s'interpose dans la vie de la narratrice chez le boucher, sur la route, à la teinturerie, avec une mère de famille, devant la télé etc. La narratrice se débat avec son "monstre textuel". Combat psycho pendant que : "La voisine se fait mettre. Elle m'empêche de dormir." p.110. "Envahie par le monstre, je ne veux pas voir, caché dans la pénombre, le voisin d'en face me regardant uriner dans l'évier" p. 115. On comprend pourquoi les mecs foutent le camp, elle n'a pas de WC propres ! Puis, le monstre "textuel" absorbe la narratrice...
Mais in fine, la narratrice revient à l'"homme" (un vrai !)et se débarrasse en deux lignes du monstre "textuel". (Ouf)!
Un truc tordu, mal écrit. Note 6/20 pour ne pas donner un beau zéro!
Hermès

vendredi 7 mai 2010

OVIDE, extraits de lettres à sa femme publiées à Rome dans "Tristes", l'an 8

A cette date de l'an 8 :
-Jésus a 8 ans, et vit à Nazareth.
-Auguste règne sur l'Empire romain.
-Ovide, qui a écrit "Les Métamorphoses" et l'"Art d'Aimer" a été exilé par l'empereur à Thomes, l'actuel Constantza en Roumanie, sur les bords de la Mer Noire, appelée à cette époque en grec le "Pont-Euxin",ou "La mer accueillante".
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Extraits de lettres-poèmes qu'il envoie à son épouse, à Rome.

Lettre III Livre I

"Ma dernière nuit à Rome,
Cette nuit sinistre
Où j'ai quitté tout ce que j'aimais.
J'y pense,
Je pleure.
.......................

Ma femme m'étreignait en sanglotant
Et je pleurais entre ses bras,
Les larmes coulaient sur ses joues pures.
.......................
Elle priait à en perdre haleine,
Elle sanglotait en parlant,
Prosternée devant les dieux de notre maison,
Les cheveux en désordre,
Elle baisait la cendre
Et elle tremblait de tout son corps.

Nos dieux restaient indifférents et froids.

La nuit avançait,
La grande Ourse tournait dans le ciel.
Je ne pouvais m'arracher à ma femme,
A ma maison, à Rome, à ma terre.
Je ne pouvais croire que cette nuit serait
La dernière.

Inquiets, mes amis me pressaient,
"Mais regardez tout ce que je quitte,
Et où je vais !"

J'allais sur le seuil de la maison, puis je revenais,
Je disais adieu, et je recommençais à sortir et à
rentrer
J'embrassais sans fin.

Comme mon coeur,
Mes jambes refusaient mon malheur,

Je faisais sans cesse d'ultimes recommandations
En regardant tout ce que j'aimais,
A la fin j'ai craqué :

"On m'expédie chez les barbares Scythes !
Je quitte Rome !
Comment pourrais-je partir le coeur léger ?
On m'enlève à ma femme,
On m'arrache, plein de vie, à ceux qui m'aiment!
Chaque instant est un trésor,
Chaque baiser une vie,
Vous que je n'embrasserai jamais plus!"

Vénus se leva dans le ciel,
J'étais déchiré.
C'était comme si j'abandonnais mon âme
Entre ces murs.

On hurla autour de moi
On se frappa la poitrine,
Ma femme éperdue m'agrippait,
"Je pars avec toi
Je ne peux pas vivre sans toi.
César te chasse, moi, c'est mon amour
qui m'enverra au bout du monde."

Je suis sorti,
Ou plutôt on m'a porté dehors,
Ma femme s'est effondrée sur le sol.
On m'a dit qu'elle s'est vue dans les ténèbres.

Revenue à elle,
Les cheveux couverts d'une horrible cendre,
Elle se relève,
Pleure sur son malheur
Sur son mari perdu
Son foyer brisé
Elle gémit comme si elle nous voyait
Notre fille et moi
Morts
Sur un bûcher funéraire.
La mort,crie-t-elle, plutôt qu'un tel malheur!

Mais elle n'est pas morte,
Elle vit pour moi,
Pour tenter de me sauver,
Pour implorer mon retour.

Lettre III Livre III

En ouvrant cette lettre tu seras étonnée
de ne pas reconnaître mon écriture.
Je suis malade, malade au bout du monde
Je ne savais si je vivais ou non.

Quelqu'un qui sait les lettres écrit sous
ma dictée.

Tu me demandes comment je vais ?
Je vis perdu dans un affreux pays
Parmi les Gètes et les Sarmates
Mets-toi à ma place,
Imagine l'état dans lequel
Je suis.

......................

Pas d'ami,
Personne à qui parler.
Des heures sans fin,
Une fatigue sans fin,
Une peine sans issue
Je suis perdu aux confins de l'humanité,
Je me meurs au fin fond du monde,
Et je vois tout ce que j'ai perdu.

Toi surtout,
Je te vois,
Je t'enlace
Je te parle, absente,
Je t'appelle.
Tu viens me voir chaque nuit,
Chaque jour.
Tout me hante,
Toi surtout!

Emporté par une fièvre intense, j'ai prononcé
De folles paroles,
On m'a dit que ton nom
Revenait sans cesse.

Et si j'étais encore dans le coma,
Et si un alcool brûlant m'était versé
Par quelque esclave dans la bouche
Ne me réveillait pas,
Ces mots "Elle arrive"
Me feraient revenir à moi.

L'espoir de te revoir me remettrait sur pieds.

Mais dans les pires instants
Je me dis que tu es heureuse
Pendant que je me meurs ici.

Non, je me trompe,
Pas toi !
Je le sais,
Pour toi aussi
C'est terrible.

Ai-je accompli mon destin ?
Est-ce cela ma fin ?
Mourir ici, et ne pas être enterré chez moi ?

....................

Je ne mourrai pas sur notre couche
Tes larmes n'apaiseront pas ma dernière soif
Personne ne pleurera sur ma dépouille,
Personne ne prendra mes dernières volontés,
Une main étrangère fermera mes paupières
Rien, Inconnu, Oublié
Je disparaîtrai dans cette terre sauvage.

Tu pleureras
Tu te frapperas la poitrine,
Tu tendras les mains vers le Levant
Et tu crieras mon nom perdu.

Mon amour, ma lumière,
Ne te griffe pas les joues
N'arrache pas tes cheveux,
J'ai disparu, le jour où l'on nous a séparés
Oui, je suis déjà mort.
La mort la plus terrible je l'ai vécue.
Cela ne te consoleras pas, je sais,
Mais dis-toi que ma mort
Mettra fin à mes souffrances.

Sois vaillante
Cela me console un peu.

.......................

Fais revenir mes cendres dans une petite urne
Pour que j'échappe à l'exil, mort.
.......................

Mêle mes cendres aux feuilles et à la cardamone
Enfouis-les en secret hors de Rome,
Et mets quatre vers sur une plaque de marbre
En gros caractères,que le passant lise :

"Ci-gît le poète des amours tendres
Ovide, dit Nason, perdu par son talent,
Toi qui connais l'amour et les doux sentiments
Aies un mot pour le repos de mes cendres."

......................

Mon nom passera les siècles

Mais toi,
Toi, mon amour,
Tu mettras sur ma tombe,
Au neuvième jour de deuil
Les offrandes des Féralies.
Et puis viens souvent,
Dépose des guirlandes de larmes,
Mes cendres sauront que tu es là.

Ma voix s'altère,
Ma bouche se dessèche,
Je ne peux plus dicter,
Et je voudrais tant te parler encore...

Adieu, mon amour,
Si ce sont mes derniers mots,
Ils sont pour toi
Adieu, ma lumière,
Moi, dans la nuit.


Lettre V

"L'anniversaire de ma femme.
Mes mains se chargeront des rites habituels
Ulysse a lui aussi célébré l'anniversaire
de Pénélope, à l'autre bout du monde.

Mes lèvres pourront-elles t'offrir mes voeux,
Elles qui ont désappris le bonheur?

Je mets cet habit que l'on porte une fois l'an
D'une blancheur si différente du blanc de mon destin.

.........................................

Regarde, la fumée de l'encens vole vers toi,
En Italie
Vapeurs et flammes t'apportent mes pensées.

..........................................

Tu es née le même jour qu'Andromaque et Pénélope
Ce jour a vu éclore ta pudeur,
Ta droiture et ta fidélité,
Mais au lieu de joie en retour
Tu as le chagrin et l'angoisse.
Sort indigne de toi !

J'entends ta plainte dans le lit vide
Soupir des femmes presque veuves.

Dieux et toi, César, qui les rejoindra
Epargnez-la,
Elle a mal
Et c'est de ma faute.

Lettre XI

"Tu te lamentes dans ta lettre de ce type
qui t'a traitée de femme de proscrit !
Cela me fait mal, non à cause du mépris
-un peu plus, un peu moins-
mais de celui qui retombe sur toi.
Je voudrais tant que cela te soit épargné.

Quand je pense, mon amour, que tu as à avoir
honte de ma faute.

Courage!
Tu as eu à subir pire que cela
le jour où la colère d'Auguste nous sépara.

Il m'a traité de "proscrit"
ce misérable !
Ma plus lourde souffrance fut
de peiner César.
J'aurais préféré mourir.
........................
Qu'il la ferme celui qui m'a traité
de proscrit.
Ce mot infâme aggrave mon malheur.

Traduit librement par Henry Zaphiratos

jeudi 6 mai 2010

Les âmes soeurs, de Valérie Zenatti, Editions de l'Olivier, 174p. 2010

Vingt-quatre heures de la vie d'une femme de quarante ans.
C'est un livre écrit pour les femmes. Mme Valérie Zenatti a ciblé son lectorat, des femmes de trente à quarante ans. Son héroïne, Emmanuelle est mal dans ses quarante ans, mal dans sa profession, avec la responsable des RH de l'entreprise où elle travaille, mal dans sa vie d'épouse, malgré le "jeu" de l'amour avec Elias, son mari qui ne se doute de rien, mal dans sa vie de mère de trois enfants, Sarah, Gary et Tim. Alors elle se réfugie dans les livres, et lorsque commence ce récit, justement elle lit le roman d'amour (bref) de Malik, un jeune algérien qui meurt dès le début de l'histoire, et de Lila Kovner, une jeune photographe juive qui couvre les événements la guerre de Bosnie. S'entrelacent à ce récit, ses réflexions désabusées sur sa vie, son amitié détruite par la mort, avec Héloïse. Amitié de femmes qui s'abandonnent et se confient leurs souvenirs d'enfance malheureuse. Tout cet ensemble glisse en cette journée qu'Emmanuelle "vole" à son employeur, et pendant laquelle elle erre dans Paris, puis dans un train pour un "voyage" qui n'en sera pas un puisqu'elle sera à la sortie de l'école pour récupérer son fils et croiser, sans le savoir, la femme qui est l'auteur du livre Malik-Lila.
Voilà la trame.
Pour le reste,tout est effleuré, jamais on entre dans le fond des âmes, jamais la profonde vérité de l'écriture n'apparaît. Nous restons en dehors des sentiments qui sont censés agiter les personnages. Pourtant l'auteure y a mis tous les ingrédients du jour : crise de l'épouse et la mère de quarante ans, amour contrarié entre un jeune algérien et une jeune photographe juive, mort de l'amie précieuse, haine contre l'entreprise et de la responsable des ressources humaines, sexe, larmes etc.
Le style est banal, parfois maniéré-pleurard. Note: 8/20
Hermès

La crise de la conscience européenne, réflexions sur la crise grecque

Hier au soir Frédéric Taddeî avait réuni de jeunes et brillants économistes avec Edith Cresson. Ils ont débattu de la crise que traverse la Grèce. Crise qui touche en profondeur toute l'Europe, par l'étonnement, la crainte qu'elle ne se propage, et la défiance qu'elle suscite envers Bruxelles.
Nous voulions l'Europe pour mettre fin aux sanglants conflits qui s'y sont déroulés au cours des deux derniers millénaires. Conflits stupides dûs à la volonté de puissance, de conquête des souverains, des princes, aux haines religieuses. Et nous, peuples de l'Europe après la première et seconde guerre mondiale nous avons décidé pour en finir, de nous unir, sans aucune hégémonie de quiconque. Robert Schuman, Conrad Adenauer ont démarré l'Europe économique par le Charbon et l'Acier en commun, le Traité de Rome. Mais un semblant d'Europe politique n'est venue que plus tard avec les structures que nous connaissons à Bruxelles et Strasbourg, la libre circulation dans l'espace Schengen. Pour l'économie, les directives de Bruxelles, l'"Euro"... Avec la monnaie unique l'inflation des prix. La baguette, pour être terre à terre, est passée en quelques jours de 3fcs,30 à 0,90€ , soit à 5fcs90 ! Les prix des M2 dans l'immobilier ont flambé. Les seuls bénéficiaires de cet arrangement astronomique ont été les banques. Est venu s'ajouter à ce tableau la libération totale des échanges, ce que l'on nomme les "mondialisme", qui devait profiter à tout un chacun. Or il s'avère que les pays à faible coût de main d'oeuvre détruisent les emplois des pays à plus hauts salaires, dont les charges sont plus élevées, etc. antienne connue.
Sur cette navigation à vue éclate la crise bancaire américaine, mais après le colmatage de Washington, les affaires reprennent, puis vient la crise grecque. L'Europe s'aperçoit de la fragilité de son système économique, car par un système de dominos, l'Espagne, le Portugal, l'Italie risquent d'être frappés à leur tour par la crise de confiance des marchés.
Conclusion : Toutes les nations dépendent des immenses organismes financiers planétaires de crédit. Si les peuples vivent au-dessus de leurs possibilités de budget, ils doivent emprunter, et avec la dette, les intérêts s'accumulent. CQFD
Or toutes les nations occidentales vivent au-dessus de leurs moyens financiers,toutes les nations occidentales empruntent, vivent sur le crédit des masses financières flottantes. Or la base d'un mécanisme c'est l'unité de jeu. L'Europe joue en ordre dispersé, et quand une crise survient, comme celle de la Grèce, elle prend chacun au dépourvu, et chacun brutalement regarde dans ses coffres ce qu'il en reste, et évalue les dangers qui peuvent survenir à tout moment.
Je résume là ce que j'ai appris hier au soir, et dans les journaux.
Or ce matin, je ne sais si c'est l'effet du débat d'hier, mais le gouvernement français a décidé "que les dépenses de l'Etat seraient gelées pour trois ans" un gel strict sauf pour les intérêts de la dette, et les pensions, quelque soit l'inflation, si celle-ci augmente le "pouvoir d'achat"de l'Etat diminuera.
Il était temps, d'après ce que je comprends. Et je pense que les dépenses "irresponsables" seront bannies. Il faut ajouter que M. Jean Arthuis, ancien ministre de l'Economie, actuel président de la Commission des finances à l'Assemblée nationale a déclaré :" la crise grecque est un révélateur. Elle doit vraiment nous persuader que nous avons, en France, le dos au mur".
Dans ce contexte on se demande où va l'Europe ? S'il ne fallait pas faire l'Europe politique avant l'Europe économique ? Est-ce que les disparités de l'Europe économique ne vont pas s'aggraver ?
Certains économistes soulevaient l'idée d'une sortie de l'Euro pour la Grèce, qui pourrait dévaluer sa monnaie (le drachme) pour relancer son économie...
Tout semble être sur la table.
Il faut espérer que tout ceci ne débouche pas sur une crise de la conscience européenne.
Hermès