vendredi 4 décembre 2009

Eloge de Périclès en -431 av-JC pour les guerriers morts au combat. Ext. de Thucydide

Périclès ( -461- -399) prononce en -431 une oraison funèbre en l'honneur des guerriers morts au combat. Il fait également l'éloge d'Athènes, de ses institutions et des ses héros ("ils ont la terre entière pour tombeaux"). Voici pourquoi, selon Périclès, Athènes est un exemple à suivre pour la Grèce et même pour l'humanité tout entière:
"Pour faire l'éloge des premières victimes, ce fut Périclès, fils de Xanthippos, qui fut choisi. Le moment venu, il s'éloigna du sépulcre, prit place sur une estrade élevée à dessein, pour que la foule pût l'entendre plus facilement, et prononça le discours suivant :
XXXV. - « La plupart de ceux qui avant moi ont pris ici la parole ont fait un mérite au législateur d'avoir ajouté aux funérailles prévues par la loi l'oraison funèbre en l'honneur des guerriers morts à la guerre. Pour moi, j'eusse volontiers pensé qu'à des hommes dont la vaillance s'est manifestée par des faits, il suffisait que fussent rendus, par des faits également, des honneurs tels que ceux que la république leur a accordés sous vos yeux; et que les vertus de tant de guerriers ne dussent pas être exposées, par l'habileté plus ou moins grande d'un orateur à trouver plus ou moins de créance. Il est difficile en effet de parler comme il convient, dans une circonstance où la vérité est si difficile à établir dans
les esprits. L'auditeur informé et bienveillant est tenté de croire que l'éloge est
insuffisant[...]
XXXVI.- « Je commencerai donc par nos aïeux. Car il est juste et équitable, dans de telles circonstances, de leur faire l'hommage d'un souvenir. Cette contrée, que sans interruption ont habitée des gens de même race est passée de mains en mains jusqu'à ce jour, en sauvegardant grâce à leur valeur sa liberté. Ils méritent des éloges; mais nos pères en méritent davantage encore. A l'héritage qu'ils avaient reçu, ils ont ajouté et nous ont légué, au prix de mille labeurs, la puissance que nous possédons. Nous l'avons accrue, nous qui vivons encore et qui sommes parvenus à la pleine maturité. C'est nous qui avons mis la cité en état de se suffire à elle-même en tout dans la guerre comme dans la paix[...]
XXXVII. - Notre constitution politique n'a rien à envier aux lois qui régissent nos voisins; loin d'imiter les autres, nous donnons l'exemple à suivre. Du fait que l'Etat, chez nous, est administré dans l'intérêt de la masse et non d'une minorité, notre régime a pris le nom de démocratie. En ce qui concerne les différends particuliers, l'égalité est assurée à tous par les lois; mais en ce qui concerne la participation à la vie publique, chacun obtient la considération en raison de son mérite, et la classe à laquelle il appartient importe moins que sa valeur personnelle; enfin nul n'est gêné par la pauvreté et par l'obscurité de sa condition sociale, s'il peut rendre des services à la cité. La liberté est notre règle
dans le gouvernement de la république et dans nos relations quotidiennes la suspicion n'a aucune place; nous ne nous irritons pas contre le voisin, s'il agit à sa tête; enfin nous n'usons pas de ces humiliations qui, pour n'entraîner aucune perte matérielle, n'en sont pas moins douloureuses par le spectacle qu'elles donnent. La contrainte n'intervient pas dans nos relations particulières; une crainte salutaire nous retient de transgresser les lois de la république; nous obéissons toujours aux magistrats et aux lois et, parmi celles-ci, surtout à celles qui assurent la défense des opprimés et qui, tout en n'étant pas codifiées,
impriment à celui qui les viole un mépris universel [...]
XLI. - « En un mot, je l'affirme, notre cité dans son ensemble est l'école de la Grèce et, à considérer les individus, le même homme sait plier son corps à toutes les circonstances avec une grâce et une souplesse extraordinaires. Et ce n'est pas là un vain étalage de paroles, commandées par les circonstances, mais la vérité même; la puissance que ces qualités nous ont permis d'acquérir vous l'indique. Athènes est la seule cité qui, à l'expérience, se montre supérieure à sa réputation; elle est la seule qui ne laisse pas de rancune à ses ennemis, pour les défaites qu'elle leur inflige, ni de mépris à ses sujets pour l'indignité de leurs maîtres.
« Cette puissance est affirmée par d'importants témoignages et d'une façon éclatante à nos yeux et à ceux de nos descendants; ils nous vaudront l'admiration, sans que nous ayons besoin des éloges d'un Homère ou d'un autre poète épique capable de séduire momentanément,mais dont les fictions seront contredites par la réalité des faits. Nous avons forcé la terre et la mer entières à devenir accessibles à notre audace, partout nous avons laissé des monuments éternels des défaites infligées à nos ennemis et de nos victoires. Telle est la cité dont, avec raison, ces hommes n'ont pas voulu se laisser dépouiller et pour laquelle ils ont péri courageusement dans le combat; pour sa défense nos descendants consentiront à tout souffrir[...]
XLIII. - «C'est ainsi qu'ils se sont montrés les dignes fils de la cité. Les survivants peuvent bien faire des voeux pour obtenir un sort meilleur, mais ils doivent se montrer tout aussi intrépides à l'égard de l'ennemi; qu'ils ne se bornent pas à assurer leur salut par des paroles. Ce serait aussi s'attarder bien inutilement que d'énumérer, devant des gens parfaitement informés comme vous l'êtes, tous les biens attachés à la défense du pays. Mais plutôt ayez chaque jour sous les yeux la puissance de la cité; servez-la avec passion et quand vous serez bien convaincus de sa grandeur, dites-vous que c'est pour avoir pratiqué l'audace, comme le sentiment du devoir, et observé l'honneur dans leur conduite que ces guerriers la lui ont procurée. Quand ils échouaient, ils ne se croyaient pas en droit de
priver la cité de leur valeur et c'est ainsi qu'ils lui ont sacrifié leur vertu comme la plus noble contribution. Faisant en commun le sacrifice de leur vie, ils ont acquis chacun pour sa part une gloire immortelle et obtenu la plus honorable sépulture. C'est moins celle où ils reposent maintenant que le souvenir immortel sans cesse renouvelé par les discours et les commémorations. Les hommes éminents ont la terre entière pour tombeau. Ce qui les signale à l'attention, ce n est - pas seulement dans leur patrie les inscriptions funéraires gravées sur la pierre; même dans les pays les plus éloignés leur souvenir persiste,à défaut d'épitaphe, conservé dans la pensée et non dans les monuments. Enviez donc leur sort, dites-vous que la liberté se confond avec le bonheur et le courage avec la liberté et ne regardez pas avec dédain les périls de la guerre. Ce ne sont pas les malheureux, privés de
l'espoir d'un sort meilleur, qui ont le plus de raisons de sacrifier leur vie, mais ceux qui de leur vivant risquent de passer d'une bonne à une mauvaise fortune et qui en cas d'échec verront leur sort complètement changé. Car pour un homme plein de fierté, l'amoindrissement causé par la lâcheté est plus douloureux qu'une mort qu'on affronte avec courage, animé par l'espérance commune et qu'on ne sent même pas. [...]
Thucydide,Les Guerres du Péloponnèse 2, chapitres 34-46, Editions GF, pp132-139

mercredi 2 décembre 2009

Le Lys dans la vallée, d'Honoré de Balzac, 1836

Le roman de la noire hypocrisie. Félix beau jeune homme promis à un bel avenir tombe fou amoureux sur un irrésistible "baiser volé" sur le cou d'une ravissante inconnue lors d'une réception pour le passage du duc d'Angoulême à Tours. Il retrouve la belle inconnue, la comtesse Mortsauf mariée à un vieil aristocrate irascible et stupide. Ceux-ci l'accueillent dans leur château de Clochegourde(sic)pas loin d'Azay-le-Rideau, en Touraine. Descriptions majestueuses de ce pays où Balzac est né et dont il restitue les odeurs et les bruits avec passion. La comtesse est baptisée "Henriette" par le jeune homme. Ce qui est étrange c'est que le mari ne "voit" pas l'attachement sentimental qui unit sa femme et Félix, ou complaisant et cynique, feint de ne rien voir car, mère de deux enfants, confite en religion,il devine qu'elle s'abandonne au plaisir délectable de ne pas céder à la passion charnelle qui la mine, et joue au sublime sacrifice.
Félix n'insiste pas trop,et rencontre Arabelle, Lady Dudley,dans les salons de la Cour, et découvre avec elle l'amour physique total. Mais son coeur reste attaché à Henriette qui apprend cette liaison et en est bouleversée.
Arabelle à Félix:
"-Je ne te reproche pas tes goûts, tu en aurais de plus dépravés que celui-ci, je tâcherais de m’y conformer ; car je veux te faire trouver près de moi tout ce que tu aimes : plaisirs d’amour, plaisirs de table, plaisirs d’église, bon claret et vertus chrétiennes. Veux-tu que je mette un cilice ce soir ? Elle est bien heureuse cette femme, de te servir de la morale ! Dans quelle université les femmes françaises prennent-elles leurs grades ? je ne puis que me donner, je ne suis que ton esclave-" p.321.
Balzac dépeint avec profondeur et génie une drôle d'époque où les femmes étaient considérées comme des pécheresses innées, ainsi cette phrase de la page 360 : "Les flots de l'air adouci jetèrent par ondées les tintements qui nous annonçaient qu'à cette heure la chrétienté tout entière répétait les paroles dites par l'ange à la femme qui racheta les fautes de son sexe. Ce soir l'Ave Maria..."
Les acteurs de la Comédie Humaine comme l'abbé Birotteau rôdent déjà là.
Une oeuvre ample, profonde, d'une écriture superbe, une richesse d'invention à chaque ligne.
Balzac a écrit puis corrigé, puis ajouté des passages, et ceci pendant près de huit ans de 1836 à 1844.

Henry Zaphiratos

mercredi 18 novembre 2009

Le Paradoxe amoureux de Pascal Bruckner, Grasset 276p. Citation :

"La nouvelle femme est peut-être l'addition de toutes les figures apparues au cours de l'Histoire : beauté vénéneuse et vierge froide, vamp perverse et mère aimante, midinette et meneuse d'homme..."

mardi 17 novembre 2009

A propos l'exposition sur le camenbert avec Armand, César, Topor, Cyrille Zaphiratos, Debuscherre,la Chanson du Camenbert, (air: "Etoile des Neiges")

Dans un coin perdu de fromage
Un tout petit asticot
Faisant d'la barre fixe en se tordant les boyaux
Sur une vieille lame de couteau

Refrain :
Hommes : Etoile des crèmes
Mon vieux camenbert
Femmes : C'est toi que j'aime
Comme mon dessert
Hommes : Après le potage
Après les fayots
Femmes : Roi des fromages
De tous les mecs
T'es le plus beau!

Il se disait dans son langage
Il me faudrait un jumeau
Nous pourrions vivre dans le Livarot
Près de vieilles lames de couteau

Refrain

Le ciel entendit sa prière
Et l'on put voir aussitôt
Sortir un à un et au triple galop
Toute une confrèrie d'asticots.

Refrain

Depuis ce jour dans le fromage
Plusieurs centaines d'asticots
Font de la barre fixe en s'tordant les boyaux
Autour d'une vielle lame de couteau

Refrain

En Normandie sur chaque table
Vous trouverez pour dessert
Ce fromage exquis, savoureux, délectable
Toujours l'éternel Camenbert

dimanche 15 novembre 2009

A propos de 1919/1939, émission TV doc. de Jean-Marie Jeanneney

Après le documentaire 1919/1939, de Jean-Marie Jeanneney, en voyant et entendant le stupide Chamberlain brandir avec triomphe, en descendant de l'avion le ramenant à Londres, le chiffon de papier que lui a signé Hitler après les accords de Munich, je comprends mieux ce qui s’est passé :
La France, première puissance européenne au lendemain de la victoire de 1918, avait signé des accords de protection et coopération militaire avec les états du centre et de l’est de l’Europe. L’Angleterre en avait pris ombrage : pas de nation hégémonique en Europe, était sa doctrine ; aussi sa politique permanente pendant cette période de la Société des Nations est de contrer la politique française, en laissant se développer des rivaux européens à la France : l'Allemagne et l'Italie. Ce qui explique la mansuétude de Chamberlain vis-à-vis de l’Allemagne.
Les présidents du Conseil français sont tombés dans le panneau : Pas de réaction au moment de la réoccupation par l’armée allemande de la Rhénanie qui devait rester démilitarisée suivant le traité de Versailles (Albert Sarraut), pas de réaction après l’Anschluss, puis Daladier tombe dans le piège de Munich, alors qu’il avait en main le rapport de l’Etat-Major français qu’il ne lui fallait à aucun prix céder à l’Allemagne sur les Sudètes, à cause des puissantes fortifications tchèques.
Cette capitulation de Daladier à Munich a ébranlé tout le système français d’alliances avec les nations du Centre et de l'Est de l'Europe (la Petite-Entente). Ce que voulait Chamberlain : la fin de la suprématie française en Europe.
Il l’a eue avec la guerre. Heureusement que Churchill lui a succédé.

samedi 14 novembre 2009

Le Grand Aveuglement, de Charles Enderlin, Albin Michel 377p.

Extraits de l'article "Arroseurs arrosés" de Jacques Attali,
l'Express du 12/18 nov.2009, page 68.

"Dès leur arrivée en Afrique du Nord en 1942, et pendant toute la guerre froide, les Américains on utilisé l'islam contre le communisme. Des officiers américains ont même poussé les Algériens à se révolter contre une France dont Washington craignait qu'elle ne tombât entre les mains communistes. Comme ils ont manipulé, dans le même but, le Vatican et la mafia, l'un et l'autre en soutiens à la démocratie chrétienne.
Charles Enderlin montre parfaitement comment cette stratégie a conduit, par un terrible engrenage, tant en Afghanistan qu'au Moyen-Orient à la montée de l'islamisme. Ainsi le dirigeant pakistanais Zia UlHak a-t-il islaminé le pays entre 1977 et 1988 avec les dollars de la CIA. Et ainsi est-on passé de quelques centaines de madrasas(écoles religieuses) en 1977 à plus de 8.000 en 1988.Les Israéliens font de même avec le Hamas, l'une des branches du salafisme; un mouvement entièrement religieux et non politique comme l'OLP..."
"...On peut faire des compromis sur le tracé d'une frontière, pas sur la nature de Dieu." Jacques Attali.

samedi 7 novembre 2009

Mille baisers

Sur une carte postale de Pompeï

Sous le soleil de Paris
Assis sur un banc boulevard
Saint-Germain. Je t'envoie
Mille Baisers...
Assis dans la 2 CV, rue Saint-Honoré.
Décapotée le ciel est bleu.
Assis dans la 2 CV, rue des Martyrs
Je contemple les étalages de fruits:
Cerises, fraises, pêches.
Je t'embrasse fort

Cyrille T.Zaphiratos
24 Juin 1997 pour maman

Place Saint-Sulpice

Il y a toujours une table et deux chaises
Il y a toujours un banc, le soir
Près de Saint-Sulpice, où s’écoule
À la fontaine des prêtres, l’eau du temps.

Il y a toujours une table et deux chaises
Pour parler à deux
En se contemplant dans les yeux.

Il y a toujours un banc dans le noir,
À Saint Germain, près la rue de Buci
Qu’embaume le marché que tu faisais
Une fleur dans tes cheveux

Il y a toujours un banc pour parler à deux,
Pour t’attendre comme un amoureux
Sur le Boulevard du Montparnasse
Où les tramways ne passent plus,
Où les cinoches du Cinéac n’existent plus
Où le bastringue de la rue de la Gaîté
A fermé ses portes.

On vend, on vend toujours des fleurs
D’amours et d’illusions sur les trottoirs.

Il y a toujours une table et deux chaises
Pour voir le temps passer,
Pour voir s’enfuir nos rêves,
Pour voir fondre nos ombres.

Il y a toujours un banc, le soir
Rue de l’Espoir.

Henry Zaphiratos (in "Voyages"1998)

vendredi 6 novembre 2009

ANGKOR

Je m'en irai par les allées mystérieuses
Où des femmes voilées dansent à pas feutrés
Je m'en irai vers quelque Angkor
Au sourire nostalgique et dédaigneux.

Par les jungles sauvages, je m'en irai,
Où dort l'antique tigre aux marbrures noires.
Seul, je suivrai cette piste imperceptible.

Je m'en irai par les forêts vierges
Où rêve certain banian brûlant de soleil
Que je sais lourd de pensées.

J'irai, quand la nuit réveillera
La pierre où dorment les Apsaras
Sur l'étang de lune semé de lotus d'or.

Henry Zaphiratos

dimanche 25 octobre 2009

De la séduction littéraire, de Florence Balique, essai, aux PUF, 2009

Un livre qui arrive bien et pourfend les fausses valeurs littéraires charriées par des "élites" intellectuelles, qui ont élevé des murs de "tabous" pour défendre ce qu'elles estiment leur appartenir : toute la critique et la domination sur ce qu'il "faut" écrire, et comment il faut "écrire", et qui utilise une langue "codée" faites de formules abconses et pédantes.
Florence Balique a cette formule brillante : "Et si le livre vous laisse indemne, à quoi bon lire, gaspillage d'heures précieuses, étrange activité qui vous cloue dans un fauteuil, vous extrait du temps, vous arrachant au mouvement vital."

Aussi l'auteure ne conseille que ce qui est le plus évident, à savoir, penser par soi-même "seul,ou entre esprits curieux destinés à s'ouvrir, non à se montrer ni à tenir salon."
J'ajouterais : aller au livre qui me plaît, jeter celui qui me fatigue et me fait perdre mon "précieux" temps, refuser les conseils "marketing" du libraire ou de la publicité, en un mot: être un esprit libre de mes choix et de mes désirs de lire.H.Z.

dimanche 18 octobre 2009

Le Festival de la Couille et autres histoires vraies, de Chuck Palahniuk, Denoël Editions, 2005, 300 pages

Ce livre, composé de différentes petites nouvelles publiées dans différentes revues américaines,décrit avec talent une certaine Amérique, une Amérique du vide, de destins brutaux, de moeurs bizarres, typiquement locales. Dans cet immense empire
mille façons de vivre coexistent, mais l'étrange, le fantastique, le burlesque, le tragique semblent être à tous les coins des blocks, sur tous les vols, sur toutes les autoroutes. Partout l'insolite peut vous sauter dessus. Et c'est au travers d'un tel livre que l'on peut mesurer ce qui sépare les Etats-Unis des autres nations. Aux Etats-Unis tout semble possible dans l'extravagance, la dureté, la passion pour quelque hobby : combat de moissonneuses-batteuses, de catch pour se "refaire" les oreilles afin d'en "être", de gonflette, déguisements fous etc. Tout cela pour "exister". En lisant ce livre nous sommes loin de l'Europe, de l'Asie, de l'Afrique, du reste du monde.
Un univers proche du vertige.

vendredi 16 octobre 2009

Sur l'extrait de "La Mauvaise Vie" de Frédéric Mitterand, publié par "Le Monde" le 8-10-09, Robert Lafont Ed.

Je n'ai pas lu ce livre.
J'ai lu l'extrait que publia "LE MONDE" le 8 octobre 09, avec l'autorisation de l'éditeur.
Dans cet extrait M. Frédéric Mitterand se révèle comme un excellent reporter. Il a le coup d'oeil juste, l'expression facile. La narration de ce qu'il a vu et vécu est vivante.Ce qu'il écrit est un reportage sur le bar, l'hôtel borgne, la chambre de passe d'un quartier chaud de Bangkok qu'il a fréquentés. C'est étonnant que cet extrait n'ait pas été cité, ou mentionné, dans les critiques qui ont paru lors de la sortie du livre, peut-être pour l'encenser ? Ce qui prouve que les critiques, qui sont payés pour, ne lisent pas les livres. La seule note de l'auteur ou de l'éditeur par son attaché de presse, à reproduire, leur suffit.
Quant à l'extrait de "La Mauvaise Vie" de Frédéric Mitterrand, que dire ? C'est d'une tristesse sans borne. Tristesse pour le propos, tristesse pour ce monde que décrit l'auteur, pour cette chasse perpétuelle d'un autre corps, de n'être plus soi-même.

jeudi 15 octobre 2009

EXTRAIT "LA CONJURATION DES ANGES" htz-Athéna Ed. 430p. 22€ - henrizaphiratos@orange.fr

"Le professeur Suchnick poireautait là depuis quarante-huit heures. Pour déjeuner et dormir, le responsable du service administratif l’avait logé dans une petite pièce aveugle où se trouvaient un petit bureau et un divan empire. De temps en temps un garde républicain venait s’enquérir de ses desiderata. Il demanda un jus d’orange, un valet en habit le lui porta sur une table roulante, avec des amuse-gueule.
Mais Suchnick en avait marre. Il lui avait été notifié l’interdiction de communiquer avec l’extérieur. On le gardait au chaud pour le président.
Il se souvint avec indignation du « fourguez-moi ce type chez le Président, j’ai d’autres chats à fouetter que ces histoires d’anges ! » du ministre. Et, on l’avait conduit à l’Elysée.
Il était furieux en songeant à ses travaux abandonnés. Il se demandait si ses domestiques Arlette et Gaston s’occupaient bien du professeur Wasnier et de son assistante, à la Reynie ? Ce week-end avec ses amis était fichu. Suchnick remuait ces mornes pensées quand la porte s’ouvrit. Il était 22heures, ce lundi 10 avril quand un garde républicain lui demanda de le suivre.
Le garde toqua à une porte.
« Entrez !»
C’est la femme du président de la République qui l’accueillit.
-Cher professeur, veuillez nous excuser de vous avoir fait tant attendre, dit-elle.
Suchnick se confondit en profonds salamalecs.
-Professeur, puis-je vous demander que notre entretien reste secret ?
-Madame, j’aurai tout oublié dès que j’aurai franchi le seuil de cette porte.
-Je vous en remercie, monsieur le professeur. Voici pourquoi nous vous avons demandé cette entrevue. Le président fait depuis plusieurs nuits le même rêve. J’ai contacté, discrètement, plusieurs oniromanciens et onirologues.
Chacun en a eu une interprétation très différente aussi je voulais votre opinion.
-Mais, madame, je n’y connais rien en matière de divination de rêve. Depuis la nuit des temps on cherche à les déchiffrer, mais c’est en vain. Les rêves gardent leur secret.
-Monsieur le professeur, il s’agit d’ange, et ma fille m’a appris
que vous travailliez actuellement sur ce thème.
-Mais ce n’est qu’une étude à partir de légendes et de mythes religieux sur la Métamorphose des Anges.
-Mais la part du vrai et du faux ? La part du réel et du surnaturel ?
-Comment le savoir, madame ?
-Mais vous vous êtes bien fait une opinion ? Je sais ce qu’il y a d’incongru à notre époque que de penser que tout cela peut interférer sur nos existences. Mais les faits sont là, et ils sont troublants. Le Président depuis plusieurs semaines est visité dans son sommeil par un être qu’il ne peut définir, homme ou femme, androgyne ? Celui-ci l’observe en silence. Mais dès que le Président tente de l’approcher pour l’interroger, l’être se dérobe, et brusquement vient sur lui et se fond en lui.
Et fait troublant, mon mari prétend que la semaine dernière, jeudi dernier exactement, un jeune mi-homme, mi-femme, disons un androgyne, très élégamment vêtu est entré dans son bureau et s’est entretenu avec lui un long moment sur un sujet dont il ne se souvient plus, mais qui lui paraît avoir un rapport avec ce songe. Le Président, fait étonnant, n’a pas été surpris par cette visite. Il m’a même dit qu’il l’attendait ! Puis, cet entretien achevé, il l’a raccompagné jusqu’à la porte de son bureau, et l’androgyne a disparu tout d’un coup.
Ce qu’il y a de plus étonnant, c’est que lorsque le Président a demandé à sa secrétaire le nom de ce visiteur, celle-ci lui a répondu qu’elle n’avait vu personne ! L’agenda du président ne mentionnait pas cette visite. Enquête faite auprès du chef du cabinet, du chef du protocole et du colonel de la garde, personne n’était venu ce jour-là, à cette heure-là !
Le lendemain, le Président recevait une lettre mystérieuse…
-Signée Uriel et Nouriel.
-Comment le savez-vous ?
-C’est le préfet qui est venu me chercher qui…
-Voilà comment on divulgue un secret d’Etat ! bondit la présidente.
-Mais je n’en connais pas la teneur, la rassura Suchnick.
-Venez ! lui dit-elle.
Le regard de Suchnick se fixa sur les élégantes chaussures de la présidente pendant qu’il la suivait à travers les salons.
-Lequel de vos collaborateurs a été dire, urbi et orbi, que vous aviez reçu cette missive signé Uriel et Nouriel ?
Le président de la République se retourna surpris par l’irruption de son épouse.
-Monsieur le professeur Suchnick vient de me l’apprendre ! Lui-même en a été informé par le préfet envoyé à sa rencontre.
-Mais je tombe des nues ! Qu’est-ce que c’est encore que cette histoire ? Le président se leva brutalement et se dirigeant vers la porte-fenêtre donnant sur le parc, comme il en avait l’habitude lorsqu’il était saisi d’une grande agitation.
-Ah, ils vont en faire des gorges chaudes au Canard enchaîné !
-Le Canard enchaîné vous n’avez que ce titre là, à la bouche ! Mais où est la sécurité de l’Etat ? Nous n’avons pas encore
déchiffré ce message qu’il va être révélé au public, intervint la présidente.
-Il faut empêcher ça !
Le président appela le ministre de l’Intérieur au téléphone.
-Merci pour la discrétion ! Dis-donc, quel est le con que tu as envoyé pour chercher cet expert en ange…ge… ?
-Angelologie, souflla Suchnick.
-Angelolographie... quoi ? quoi ? Tu n’en sais rien ? Demande à ton chef de cabinet… j’attends…, le président pianota d’impatience, foudroyant du regard sa femme et Suchnick.
Au bout de quelques instants un nom lui parvint.
-Bruneau ? Tu me fous en cabane ce gazier-là pour quelque temps !
-Chandon !
-Monsieur le Président ? Une tête apparue derrière une porte.
-Tout le système de sécurité de l’Elysée, c’est de la merde ! Le moindre coup de téléphone, la moindre conversation se retrouve dans les états-majors du monde entier ! C’est une boutique de verre, ici !
-Mais, monsieur le Président, la Sécurité a fait tous les tests. Rien ne filtre vers l’extérieur…
-Baratin !
Le président furieux claqua la porte.
-Vous !
-Moi ? balbutia Suchnick.
-Venez avec moi !
Suchnick suivit le président dans le couloir qui conduisait à un ascenseur devant lequel était posté un garde républicain.
Suchnick tenta un mot pendant la descente, mais le président d’un geste catégorique le fit taire.
Dans les sous-sols de l’Elysée, ils traversèrent une série de bureaux ultra modernes où des officiers en plein travail, claquèrent des talons à leur passage, et pénétrèrent dans un vaste bureau bunker.
-Monsieur le Président… risqua Suchnick.
-Pas encore, lui dit celui-ci, qui fit signe qu’on referma la porte blindée et qu’on les laissa seuls. Puis il passa sa main sur une zone d’onde du bureau pour isoler totalement la pièce des rayons.
-Maintenant, allez-y, mon vieux.
-Monsieur le Président, je ne comprends pas : on m’a envoyé chercher pour une histoire d’ange, votre épouse m’a parlé de rêves et d’une visite aussi…
-Exact ! Qu’est-ce que vous en pensez ? Les mâchoires du président claquèrent faisant saillir les muscles de ses maxillaires.
-Du plus loin que l’on remonte dans l’histoire de l’humanité…, commença Suchnick, en joignant les doigts, l’air pénétré comme pour un cours magistral.
-Abrégez !
Suchnick pris de panique rassembla ses idées pour une rapide synthèse.
-Pour les croyants, les anges sont les messagers de Dieu…
-Je sais cela. Ecoutez, je vous ai fait venir parce que mon épouse et ma fille sont inquiètes. Si vous savez quelque chose, éclairez-moi, épargnez-moi les généralités. Voilà ce qui m’importe c’est :
a) de comprendre pourquoi l’un d’eux vient me visiter la nuit
depuis plusieurs semaines,
b) quelle interprétation donner à sa façon de m’observer et soudain de foncer sur moi ?
c) que veut dire la visite incroyable de ce jeune mi-homme mi-femme ?
-Voilà, vous voyez que vous y venez, Président ! C’est un message que l’on veut vous transmettre."

mercredi 14 octobre 2009

La Conjuration des Anges, H. Zaphiratos, Extraits, Chapitre 1° et 2° / Chiron-HTZ-Athéna Editions 430 pages

"Voici comment cela a commencé…

Lundi, le 4 avril, 23h 15

La nuit était douce, une vraie nuit shakespearienne. La pleine lune se reflétait sur les eaux du Grand Canal. Maximilien descendait l’Allée Royale du parc du Château de Versailles, les sens encore à vif. Il regrettait les seins lourds, la chevelure en cascade, la chair palpitante de la jeune femme qu’il venait de quitter. Il n’avait qu’une envie, c’était d’écourter ce rendez-vous pour revenir la retrouver pour les quelques heures de bonheur qu’ils leur restaient avant l’aube. Il accéléra le pas à l’approche du bassin d’Apollon. Près du bosquet des Marronniers, il s’arrêta et attendit.
Soudain un cri rauque traversa la nuit et le fit sursauter : «Comte de Larmenius ! »
Il se retourna.
Un homme revêtu d’une cagoule noire surgit de la masse sombre des bosquets et se précipita sur lui. Il vit deux ailes immenses se déployer, et, avant qu’il ait pu esquisser un geste, il s’effondra, le crâne fracassé.
« Tu as été démasqué, Maximilien Le Coche !» dit l’homme d’une voix caverneuse, et se penchant sur lui, en une sorte de requiem, il lui enfonça un poinçon en forme de poignard dans l’occiput d’où s’échappèrent des flots de sang.

Mardi 5 avril, 7h.25

Le commissaire Marceau, chef de la brigade criminelle de Versailles, la quarantaine élégante, défit son trench-coat, et, réprimant un sentiment d’horreur, se pencha sur le cadavre que les pompiers venaient de retirer du Grand Canal, et avaient déposé sur la pelouse.
- Qu’en penses-tu ? glissa-t-il à Caroline Léger, qui, de ses doigts gantés de latex l’examinait.
- Regarde ! C’est du beau travail, répondit-elle avec un éclat de satisfaction dans la voix. Un coup sec et il est passé de l’autre côté.
Il détourna les yeux du corps sanguinolent.
- Tu n’arrives pas à t’y faire, lui lança-t-elle avec un regard plein de commisération.
- Qu’en déduit l’insensible médecin-légiste ?
Caroline Léger haussa les épaules, et soupira.
- À première vue : le crâne a été fracassé par un objet tranchant qui s’est abattu d’en haut… La clavicule droite a été brisée.
- L’arme du crime ?
- Probablement ceci.
- Ce petit bloc de marbre ? murmura Marceau regardant incrédule le petit obélisque que lui montrait Caroline.
- En frappant pointe en avant, avec une force peu commune, l’agresseur lui a fracassé le crâne.
Caroline retourna la tête du cadavre avec précaution, et sous son index ganté les vertèbres cervicales craquèrent.
- Regarde !
Elle souleva une touffe de cheveux et découvrit une plaie.
- Une croix gammée !
- Ça m’en a tout l’air.
- Des nazis ? Ils ont pris le temps de signer leur crime.
-Ou un règlement de compte entre sectes… peut-être un crime passionnel camouflé en crime politique ? En tout cas, je te souhaite bien du plaisir.
-Plaisir partagé, ma chérie, grogna Michel Marceau en se redressant. Nous sommes sur le même bateau. Il vaut mieux que tu fasses vite, car si c’est un crime politique…
-S’il te plaît, je vais à mon rythme, marqua-t-elle, en levant la main pour l’arrêter.
-Ok. on va pas se fâcher !
Caroline avait toujours son sacré caractère.
C’était bien sa chance, il y avait trois médecins légistes et il fallait qu’il tombe sur elle !
Elle ne se remettait toujours pas de leur engueulade pour l’affaire Swinston.
L’adjoint de Marceau, le lieutenant Desaffre lui tendit la pièce d’identité de la victime.
-Merde… Maximilien Le Coche, Inspecteur général chargé des Domaines de Versailles. Un haut fonctionnaire ! murmura le commissaire.

°

Une Peugeot 307 pila devant la grille du Petit Pont. Edouard Le Coche, vingt deux ans, les cheveux roux portant un blouson de cuir noir, parlementa avec excitation, avec l’agent
de faction qui bloquait le passage. Exaspéré par son refus de le laisser passer, il jaillit de la voiture, et se précipita vers le Grand Canal.
-Je suis le fils de la victime, dit-il aux policiers qui tentaient de l’intercepter. Ceux-ci, sur un signe du lieutenant Desaffre, le laissèrent passer.
-Ils l’ont tué !
-Qui… « Ils » ? demanda Marceau.
Edouard pétrifié devant le corps de son père, ne répondit pas.
-C’est un complot, murmura-t-il.
-Un complot ? Qui vous fait croire cela ?
-Mon père m’avait dit qu’il avait suscité des jalousies à cause des fonctions qu’il occupait. Le téléphone sonnait souvent la nuit sans explication, sa voiture était suivie, ses déplacements surveillés, s’énerva Edouard Le coche.
-Calmez-vous ! A-t-il porté plainte ?
-Je le lui avais conseillé, mais il n’osait pas, il craignait de déchaîner une opposition encore plus grande. Il y a une guerre feutrée dans ce milieu. Diriger les 93 hectares des jardins du château, les 1858 hectares du Petit Parc et les milliers d’autres du Grand Parc cela attise des jalousies ! Il en était conscient.
-Vous avez des noms ?
-Rien, je n’ai rien. Mais il faut chercher dans ses papiers, dans son entourage.
-Nous chercherons !
Le lieutenant Desaffre après un instant de réflexion :
-Monsieur Le Coche, votre père avait-il une double vie ?
-Comment ?
-Avait-il une maîtresse ?
-Pas que je sache, hésita Edouard.
-Je sais que c’est difficile, mais procédons par ordre. Quand l’avez-vous vu pour la dernière fois ?
-Hier après-midi, au moment où je partais pour mon cours à la Sorbonne. Nous sommes sortis ensemble de l’appartement après déjeuner. Il avait une réunion importante au Château. Il était, comme à son habitude, détendu. Depuis, je n’ai plus eu de ses nouvelles, jusqu’à votre coup de téléphone de ce matin, chez moi, à Paris.
-Nous n’avons pas appelé.
-Comment vous ne m’avez pas appelé ? fit Edouard étonné, qui donc m’a appelé ?
-L’assassin…, dit laconiquement Desaffre. À quelle heure ce coup de téléphone ?
-Il y a trois quarts d’heure environ…
-On vérifiera ! Que vous a dit votre interlocuteur ?
-Qu’il était arrivé malheur à mon père. J’ai insisté pour en savoir plus, mais il a raccroché.
-Et c’est tout ?
-Oui… Mais quelqu’un m’a téléphoné, cette nuit, vers une heure du matin…
-Et alors ?
-Il m’a textuellement dit : Edouard Le Coche, ton père a rencontré le démon cette nuit, puis il a éclaté d’un rire sinistre. J’ai cru que c’était une farce de copain, je l’ai engueulé, demandant qui c’était. Il a raccroché. J’ai tout de suite appelé mon père, mais impossible de l’avoir, ses lignes étaient sur répondeur.
-Vous pourriez reconnaître cette voix ?
-Oui ! C’était une voix rauque, gutturale. C’est ce matin, après votre appel, enfin l’appel que j’ai reçu, que dans la voiture j’ai appris par France Info ce qui s’était passé.
-Voici le carnet d’adresses, la carte d’identité, les cartes de crédit, mille cinq cents euros, la chevalière incrustée de rubis en forme de croix et le trousseau de clefs que nous avons trouvés dans ses poches. Vous les reconnaissez ?
-Oui, répondit Edouard après un rapide coup d’œil.
-Je vois que vous portez la même bague, dit Desaffre, en lui désignant son annulaire droit.
-Oui, c’est une bague jumelle, il me l’avait offerte pour mes dix-huit ans... Et le corps de mon père ?
-Il va être transporté à l’Institut médico-légal pour autopsie, après il sera à votre disposition.
Le lieutenant désigna la civière.
-Vous pouvez le voir. C’est nécessaire pour l’identification, insista-t-il, devant le douloureux effroi du jeune homme.
Les experts de la Police scientifique achevaient de filmer la victime.
-Prenez-moi en gros plan la taillade sur le crâne, recommanda Marceau.
-Ok, patron !
Edouard se pencha, et eut un mouvement de recul, horrifié.
-Un swastika, murmura-t-il.
-Cette marque provient de ça !
Avec un mouvement de triomphe Caroline Léger s’était approchée en manipulant entre ses doigts gantés le petit bloc pyramidal tâché de sang que l’agent Vinille venait de découvrir dans un fourré.
-Regardez !
Elle pointa un swastika gravé à la base du marbre.
-Marceau !
Elle se dirigea vers lui, en l’agitant comme un trophée.
-C’est horrible ! murmura Edouard Le Coche en songeant que ce bloc de marbre avait fracassé le crâne de son père.
-Lui connaissiez-vous un contact avec des éléments néo-nazis ? poursuivit Desaffre.
-Non ! dit avec force Edouard scandalisé.
-Cherchez bien ! Votre père a-t-il eu une altercation, ou un différend quelconque avec un inconnu ?
-Non, à part ce que je vous ai dit sur son milieu professionnel, le reste, non, je ne vois pas… il n’avait de différend avec personne.
-Et vous-même ?
-Moi ?
-À la fac… avec vos condisciples ?
-Non, je ne vois pas.
-Pas d’échauffourée avec des skinheads ou des Iroquois ?
Edouard fit signe que non.
-Bon, merci. Donnez-moi vos téléphones…
Edouard inscrivit ses numéros de fixe et de portable sur une feuille de son calepin qu’il déchira et tendit à Desaffre.
-Ne quittez pas la région parisienne, nous pourrions avoir besoin de vous.
Edouard fit « oui » de la tête et s’en alla cachant les sanglots qui l’étreignaient.

2

Le 5 avril

Marceau remonta l’Allée royale, d’un coup d’œil il engloba les 570 mètres de façade et les 357 croisées donnant sur les jardins du château et se dirigea vers l’aile Nord. Il contourna les parterres d’eau décorés d’enfants et de nymphes. Il grimpa les marches de l’escalier.Àcette heure matinale Versailles était encore vide de touristes. En passant Marceau lut sur le panneau d’affichage de l’entrée que les guichets ouvraient à 9h. Il avait donc une heure de calme devant lui pour faire avancer son enquête.
Elisa Desprès l’accueillit dans son grand bureau, entourée des ors du Grand siècle.
-Vos inspecteurs m’ont avisée du drame. L’assassinat de monsieur Le Coche est une affaire d’Etat, j’ai déjà informé le président de l’établissement public de Versailles et le ministère.
-Affaire d’Etat, c’est un peu tôt pour le dire. Pour l’instant c’est un meurtre, pas banal, je l’avoue, mais un meurtre.
Marceau se cala dans le fauteuil Louis XV broché de soierie bleu qu’elle lui avait indiqué et sortit une cigarette.
-Ah non ! Il ne va pas fumer ici, celui-là ! lut-il dans les yeux de la conservatrice
-Rassurez-vous, je ne dois pas. Puis, la remettant dans son paquet, c’est le seul moyen que j’ai trouvé pour arrêter de fumer : simuler le geste…
-Il faut beaucoup de courage pour arrêter, concéda Elise Desprès.
-Oui, soupira-t-il.
-Où, l’avez-vous trouvé ?
-Vous parlez de la victime ?
-Oui, monsieur Le Coche, demanda-t-elle, le regard neutre, perdu sur l’horloge de bronze doré de son bureau.
-Dans le Grand Canal.
-Mon Dieu, dans le Grand Canal ! Mais c’est épouvantable !
Elle voyait déjà des flots de curieux conduits par des guides désignant l’endroit du meurtre, les plates-bandes piétinées, les eaux souillées par les déchets des foules incontrôlables.
-C’est un meurtre inimaginable ! Dans le Grand Canal !
-Eh oui ! Il semblerait qu’ils aient traîné le corps et l’auraient jeté là.
-Mais c’est affreux !
Marceau admira la maîtrise de cette belle femme blonde qui devait avoir entre trente huit et quarante ans, peut-être plus, comment savoir avec les crèmes, la thalassothérapie, les liftings ?
-Vous lui connaissiez des ennemis ?
-Non, mais je ne l’ai rencontré que très peu, je viens tout juste d’entrer en fonction.
-Ah ! La dernière fois que vous l’avez vu, comment était-il ?
-C’était hier après-midi, après la visite avec la représentante de la Fondation américaine, au bosquet que nous surnommons Les Cascades. Nous avons fait le point ici, lui, dans le fauteuil que vous occupez. Il ne semblait pas inquiet. Nous avons revu les dates des principales manifestations de l’été prochain, comme les Grandes Eaux musicales, les Fêtes
de Nuit avec feux d’artifice. Je lui ai communiqué le programme des spectacles de théâtre du grand Trianon.
Marceau exhiba un petit bloc de marbre blanc, qu’il avait sorti d’un petit sac de plastique.
-Mais c’est un obélisque funéraire ! s’exclama Elise Desprès, après l’avoir examinée. Elle provient des fouilles de la Vallée des Rois, de la période de la reine Karomana. Cette tâche brune ?
-Probablement le sang de la victime.
-Quelle horreur ! s’exclama Elise, en lâchant l’objet que rattrapa prestement Marceau.
-Excusez ce mauvais réflexe !
-Question d’habitude, sourit Marceau. Vous êtes dans les ors, nous dans le réel, c’est tout.
-Mais j’y pense, reprit Elise, ce petit obélisque doit faire partie de la collection des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre. Il me semble qu’il a été prêté à l’Institut du Monde Arabe pour son exposition sur l’Egypte.
-Ah !
-Pour illustrer un benben.
-Un benben ?
-Un tertre à offrandes dans l’Egypte ancienne. Le lieu où les prêtres d’Isis et d’Osiris venaient déposer leurs présents, le long de la Vallée des Rois, dans les temples comme Louqsor. Cette pièce n’est qu’une reproduction funéraire qui accompagnait le mort dans son tombeau avec les autres reproductions de ses biens, une coutume que l’on retrouve encore en Chine. En découvrant les sarcophages, on les trouvait. Je dois avoir le catalogue de cette exposition.
Elisa Desprès se dirigea vers une grande table sur laquelle étaient empilées des brochures.
-Tenez, regardez, voici la photo de ce benben, Marceau la compara avec soin, à l’obélisque.
-C’est bien la même pièce, je vais demander une vérification sur la base de données des 55.000 objets d’art volés chaque année en France.
-Permettez, monsieur le commissaire.
Elisa Desprès consulta son ordinateur.
-Déclaration de vol du 15 juin 2004 du Commissaire de l’exposition de l’Institut du Monde Arabe. Le voici, dit-elle.
Marceau prit les références, puis :
-Vous parliez d’une Fondation américaine ?
-Elle finance la restauration du bosquet que nous nommons Les Cascades. Comme vous le savez, Versailles retrouve peu à peu, sa splendeur passée grâce à de généreux donateurs dont nos amis américains. C’est une tradition pour eux. C’est au château que fut signé le traité reconnaissant l’Indépendance des Etats-Unis. Les Rockfeller ont grandement participé au sauvetage de Versailles.
-Où puis-je contacter les personnes de la fondation qui travaillaient avec M. Le Coche ?
-Mrs. Pamela Hocker ? Elle est descendue au Pavillon Henri IV, à Saint-Germain-en-Laye. Voulez-vous que je la prévienne ?
-Non, merci, j’enverrai quelqu’un. Ah, j’oubliais… pour les besoins de l’enquête, j’ai fait fermer les grilles d’entrée du parc. Le temps de relever les indices. Vous ne voyez pas d’inconvénient à cela ?
-Si l’enquête le nécessite, monsieur le commissaire ! L’an passé, un conservateur du Louvre a été assassiné, aujourd’hui
c’est le Directeur des Parcs et jardins de Versailles ! Mais pourquoi , mon Dieu ?
-Pure coïncidence. J’essaierai d’aller vite. Rassurez-vous. Il est peu probable qu’il y ait un lien entre ces deux affaires. Une question encore, avez-vous une idée sur le motif de cette incursion de nuit, de Monsieur Le Coche, dans le parc ?
-Je ne peux rien vous dire. Peut-être une vérification, peut-être l’envie de découvrir le parc, une nuit de pleine lune. C’est un enchantement sous cette voûte étoilée !
-En heureuse compagnie, je n’en doute pas, mais, en solitaire ?
-Oh, tout le monde a ses fantaisies. Et puis, chacun travaille à sa manière. L’important c’est le résultat ! La magnificence de Versailles.
-Les trésors attirent bien des convoitises !
-Oh que oui !"

jeudi 8 octobre 2009

Ma vie avec Mozart, de Eric-Emmanuel Schmitt, Albin Michel Edit.2005, 160 pages

Mon ami, mon frère dans l'humaine condition.
J'ai beaucoup aimé les pièces d'Eric-Emmanuel Schmitt "Le Visiteur" & "Oscar et la Dame Rose", et je le tiens pour l'un de nos plus grands dramaturges contemporains. J'ai aimé aussi ce petit livre où il raconte avec ferveur les touches que Mozart a apporté à sa vie. A quinze ans, il était désespéré que la condition humaine le contraigne à une mort inéluctable, et les airs de Chérubin des Noces de Figaro lui redonnent goût à la vie. Plus tard c'est l'Ave verum corpus qui le conduit au paradis de la ferveur. Dans ce dialogue d'une âme avec elle-même, à travers la musique du divin Mozart, toute la vie d'Eric-Emmanuel Schmitt se déroule, se comprend, la détestation pour le "carriérisme", le "Colloredo", l'entrée dans la foi, la lutte contre la souffrance de la perte d'êtres chers, la réflexion, méditation sur la vie, "les choses de la vie", l'"essentiel de la vie". Tout ceci ponctué par les messages musicaux des oeuvres de Mozart.
Peut-être aurais-je aimé quelque chose de plus. Un supplément d'attention littéraire. Le propos était si beau. Il méritait quelques petites inflexions de style. Oh, non pas de grandiloquence, mais quelque chose qui touche vraiment...
Il faut ajouter qu'un CD des morceaux évoqués dans le texte figure dans son enveloppe dans le livre.
Le texte s'achêve par ces paroles du livret de "La Flûte enchantée":
Tamino et Papageno :
"Trois jeunes garçons, beaux, doux et sages,
nous apparaîtront au cours de notre voyage.
Les Dames
"Ils seront vos guides
ne suivez que leurs conseils.
Tous :
Adieu, nous devons partir.
Adieu, adieu.
Nous nous reverrons."
Une belle méditation.
Henry Zaphiratos

VENISE, "Des Racines et des Ailes",Fr3, le 7 octobre 2009

Enchantement de parcourir les ruelles, de suivre les gondoles sur le Grand Canal, de visiter le palais des Doges, la salle du Grand Conseil, le palais royal de Bonaparte, la basilique de Saint-Marc, de revoir les quatre chevaux de bronze dorés de l'hippodrome antique volés à Constantinople en 1204, au moment du viol de la ville par les Croisés de la 4° Croisade, de revoir les Tintoret, les Véronèse, les Titien etc. , les palais-entrepôts, les palais de la Terra Ferma dessinés par Palladio, décoré par les plus grands peintres de l'époque, l'Arsenal qui est en rénovation, de voir vivre les Vénitiens et leur bonheur tranquille...
Et stupéfaction, découvrir les "oeuvres d'art moderne" d'un richissimme mécène français, une accumulation de platitudes hétéroclites de sculptures, de tableaux, etc.
La beauté de Venise écrasait ce reste. HZ

mercredi 7 octobre 2009

Les Catilinaires,d'Amélie Nothomb, Albin Michel Edit. 1995, 210 pages

Le héros, Emile est un prof de latin-grec retraité, sa femme, une brave petite bobonne, deux nuls, qui n'ont jamais dit "non", et au soir de leur vie subissent sans broncher les coups de pied au cul que leur inflige un "vieux" médecin de 70 berges, Palamède, en venant tous les jours s'incruster de 16h à 18h. dans un mutisme idiot, sans leur autorisation.
Ce type traîne une grosse truie qui passe son temps à enfourner de la soupe. A la fin, Emile, après d'interminables débats philo-brumeux, zigouille, après sa tentative de suicide avorté, un Palamède(le toubib) à demi-consentant, et la mémé s'occupe de fleurir et de faire bouffer la grosse patate.
L'héroïsme c'est de lire une telle histoire, écrite sans style, truffé de sentencieuses pensées latines pour épater le lecteur. D'ailleurs le titre a été piqué sans vergogne à Ciceron, pour faire intello "chic".
Ce qui m'a frappé c'est le mépris pour les "vieux" qui s'en dégage.
La brave jeune fille qui "admirait" son prof, et qui était venue lui rendre visite, fuit, quand elle voit la connerie de celui-ci devant cet amas muet de graisse.
HZ

dimanche 27 septembre 2009

2666 de Roberto Bolano, traduit de l'espagnol(Chili) par Robert Amutio, Christian Bourgois Editeur 2008

Ce livre de 1016 pages, est divisé en cinq parties :La partie critique, La partie d'Amalfitano, la partie de Fate, La partie des crimes, La partie d'Archimboldi.

Mon propos ne concerne que la première partie.
Trois copains-écrivains Jean-Claude Pelletier( Français),Morini(Italien),Manuel Espinoza(Espagnol)se lancent à la recherche et à l'étude d'un écrivain allemand Benno von Archimboldi. Ils vont de séminaires en congrès, en colloques dans cette quête éperdue, à travers des étreintes avec une Liz Norton qui s'intéresse aussi à cet illustre inconnu.
Discussions oiseuses,cérébralité, disgressions savantes etc. Tout est fait pour décourager le lecteur lambda que je suis. Aussi ai-je arrêté ma lecture à la première partie, pour ne pas être dévoré par l'"inutile".
Il paraît que dans les autres parties, ai-je lu dans une critique, il serait question d'une cité de frontière, Santa Theresa (qui ne serait autre que Ciudad-Juarez)où l'on assassine des femmes etc., et 800 pages !
C'est étrange, mais j'ai l'impression que certains livres sont ce que je nommerais une "littérature du dehors". Ils traversent le réél, suspendu aux fils que lui a tendus l'auteur. Je les contemple comme des funambules lointains.
Ce livre a été traduit avec le concours du Centre national du livre.
HZ

mercredi 23 septembre 2009

Le Passé, de Alan Pauls, traduit de l'espagnol par André Gabastou, Christian Bourgois Editions 2005, 656 pages

Rimini aime Sofia, après douze ans de mariage ils se séparent. Sofia a couché avec Rafael, un de leurs amis, Rimini rencontre Véra...
Une trame ténue, mais un développement kafkaïen. Rimini ne sait jamais qui il est pourquoi il aime, et se drogue à la dure. Traducteur, il vit dans une sorte de demi conscience. Comme ce livre est confus, traversé d'éclairs, mais aussi de pathos, je crois intéressant d'en extraire certaines phrases :
"...ils allèrent au cinéma voir "Rocco et ses frères" un film pour lequel ils se faisaient concurrence avec un fanatisme sauvage. Combien de fois l'avaient-ils déjàvu ? Douze ? Dix-sept ? Quelques secondes avant d'arriver à la scène ou Annie Girardot et Delon sur le toit de la cathédrale- scène où Rimini perdait son sang-foid et pleurait comme un enfant-..." Page 65
"Le monde brillait comme un sou neuf et Rimini, fatigué mais heureux, vorace comme l'étranger qui vient d'atterrir après un voyage interminable..." Page 76
"Elle(Véra) arrêta immédiatement de pleurer; Rimini aurait juré que les larmes remontaient le long de ses joues pour regagner les conduits lacrymaux..." P.99
"Ils (Rimini et Véra) découvrirent avec l'étonnement lunatique, totalement disproportionné, des personnes tournées vers elles-mêmes qui découvrent tout à coup qu'elles sont à l'endroit où il était évident qu'elles devraient être, qu'ils étaient devant une rôtisserie." Page 109
"Rimini se redressa, suffoqué que le stoïcisme simple avec lequel Carmen déjouait ses gestes de sur-protection" Page 309
"...l'intercession du jeune médecin, "Prostate, Foie" et toutes les oeuvres à venir, le billet de cent shillings, le frôlement divin de sa verge contre le palais du jeune médecin, l'hostilité du soleil cet après-midi-là à la terrasse du café, le "check out" agité à l'Association des jeunes chrétiens..." Page 470
Un livre étrange.
Je me demande parfois si les écrivains latino-américains ne se sentent pas en "exil",en littérature, pas tout à fait Européens, pas tout à fait Latino-Américains. A la recherche d'eux-mêmes.
Livre intéressant, mais difficile. Loin du "long fleuve tranquille".HZ

lundi 21 septembre 2009

Arbre de fumée de Denis Johnson, traduit de l'américain par Brice Matthieussent, Edit.Christian Bourgois 2008, 680 pages.

C'est un livre gigogne.L'auteur pourrait le continuer indéfiniment, tant les pages et les chapitres se ressemblent. L'auteur s'est jeté à corps perdu dans tous les journaux et livres sur la rebellion des Huks aux Philippines, sur la guerre américaine au Viêtnam. Puis il a créé avec un talent répétitif des personnages autour du thème de la CIA dans ces conflits meurtriers. Le drame c'est qu'on n'y croit pas un instant. Des agents qui vont se proclamer des espions au vu et su des gens de ces pays, ce n'est pas crédible. Graham Greene et d'autres ont fait mieux et plus court. Ce qu'il montre bien c'est l'absence d'idéal, de motivations des Américains qui se trouvent engagés au Viêtnam, et qui pour oublier passent leur temps à avaler des litres de bière Lucky, du brandy de riz( que l'on appelle communément l'alcool de riz), du whisky etc. qui ne pensent qu'à baiser, ne savent plus très bien s'ils sont catholiques, calvinistes, ou adventistes du 7° jour etc. qui se baladent avec dans la tête des versets de la Bible, ou des Actes des Apôtres, oubliant les paroles du Christ, tout cela dans la boue, la jungle, les rizières, parmi des Sud-Viêtnamiens qui ne savent pas ce qu'ils doivent faire,(qui boivent de l'eau et non du thé...) contre leurs adversaires du Viêtminh-Viêtcongs déterminés, au patriotisme de l'An II, prêts à tout, comme les Américains, pour vaincre. Pour faire "intello" et s'attirer la faveur de la critique quelques passages d'Antonin Arthaud, de Cioran, Georges Orwell entre des phrases comme :"...si jamais le Saint-Esprit débarquait au Viêtnam, il se ferait sans doute arracher les couilles par un éclat d'obus." page 363. Ceci rythmé mollement et pour intéresser Kansas-City, de coups de téléphone avec la maman aux USA. Maman qui ne tardera pas à mourir pour faire "choc" littéraire.
Mais Denis Johnson a le souffle de la rengaine, une écriture où pleuvent les mots d'"enculé, con, chatte etc." A l'armée, comme à l'armée, ça fait viril !
L'auteur a évité d'évoquer la fuite peu glorieuse sur les toits de l'ambassade américaine de Saïgon, en 1975,au moment de la prise de cette capitale par le Viet-Minh-Viêt-Cong.Cela aurait fait tâche au milieu d'une logorrhée de rouleurs de mécanique. Mais les documents filmés de cet événement sont dans les archives.
Il faut ajouter qu'en première page, l'éditeur annonce que "l'ouvrage a été traduit avec le concours du Centre national du livre"
Il paraît qu'il a eu le prix US : "National Book Award 2007"!
Un lourd pensum de 28€

lundi 31 août 2009

N'oublie pas d'être heureuse de Christine Orban- Editions Albin Michel 2009

Une connaissance avait emporté dans ses bagages de vacances ce roman parmi d'autres. Elle n'a rien lu, préférant le soleil, la plage, la piscine, les balades. Comme j'étais cloué dans un fauteuil, elle m'a tendu ce livre en me disant qu'elle l'avait acheté "comme ça". L'histoire, par le 4° de couverture, l'intéressait. Une jeune fille, née au Maroc, rêve de Paris, des Parisiens, de la "Haute société" parisienne, cocktails, people,snobs, bourgeoisie feutrée aux couverts en vermeil et argenterie ancienne etc. Elle vit dans ce rêve qui est constamment alimenté par une amie de sa mère qui fait le va et vient entre la France et le Maroc, et lui apprend que "plus snob que moi, tu meures !" La jeune héroïne part à Paris, rencontre le prince charmant, et entre dans la "high society" etc.
Un roman pour une torpeur de vacances, que l'on peut lire en diagonale.
Où est Colette et ses "Claudines" ?

lundi 24 août 2009

Corse, Terre vaticane, de Michel Orsini, Editions Sud-Régie 1976

Ce livre extrèmement documenté sur l'histoire de la Corse est une thèse en Droit Canon soutenue à l'Université Pontificale du Latran à Rome le 27 février 1975.
Je l'ai trouvé dans la bibliothèque d'un ami corse, au milieu d'un magnifique paysage où les montagnes plongent dans le turquoise de la mer,et j'ai pensé qu'il intéressera quelques lecteurs.
La Corse, que les Grecs dans l'Antiquité peuplèrent (en même temps que les Etrusques),la baptisèrent "Kallista"(La plus belle). Après être restée des siècles dans l'Empire romain,c'est en Corse que l'empereur Néron envoya en exil le grand philosophe Sénèque. A la chute de l'Empire, la Corse suivit les vicissitudes des régions de l'Empire avec les invasions des barbares(Vandales, Lombards, Goths, Arabes, etc.) Pepin le Bref, roi des Francs et son fils Charlemagne, appelés par le pape pour le protéger, après des victoires décisives, constituèrent "Les Etats de l'Eglise".La Corse en fit partie avec le port de Luni.
Les papes confièrent l'administration de l'île à l'archevêque de Pise. C'est ainsi que la Corse fut pisane pendant quelques siècles(magnifiques églises de style pisan). Siècles de prospérité et d'équilibre.
Au XIII° siècle la défaite navale de Pise face à la République de Gênes, met fin à l'administration pisane,et la Corse passe sous la domination des Gênois. Pour "légaliser" cette prise de possession par Gênes, le pape éleva l'Evéché de cette Ville-Etat en archevéché, et confia à l'archevêque de Gênes "l'administration" de la Corse. Administration toute nominale, malgré le contrôle des Visiteurs Apostoliques délégués par le Saint-Siège.
Les Génois, en effet, en étaient les vrais maîtres,avec leurs seigneurs, et condottieres. Ils construisirent des forteresses et des tours de guet (on en a recensé plus de 83 que l'on est en train de réhabiliter), défendirent l'île, mais aussi se montrèrent durs, et dominateurs.
Les Corses se révoltèrent à plusieurs reprises, et au XVIII° siècle, la République de Gênes demanda à Louis XV l'envoi de troupes françaises pour l'épauler contre la rebellion, ce qui fut fait. Mais sitôt les Français repartis la révolte reprit contre Gènes, et les Corses, sous la conduite de Paoli, fondèrent à Corte, au coeur de l'île,une république avec une constitution, la première de l'ère moderne(avant celle des Etats-Unis). Paoli qui savait que Gênes cherchait à vendre la Corse, soit à l'Angleterre, soit à la France, demanda au Saint-Siège de faire valoir ses droits de propriété sur l'île. la nouvelle république resterait ainsi indépendante, sous l'"autorité" nominale du pape.
En 1764, Gênes vend la Corse au roi de France. Le marquis de Marbeuf en devient gouverneur. Le Saint-Siège n'élève aucune protestation.............................................. Mais le souligne Paul-Michel Castellani-Leandri, Président de "Corsu et fieru" dans CorseMatin du 13/02/2012 répondant à une interview :"Mais, devant le fait accompli, les papes n'ont rien dit… : Détrompez-vous. On retiendra la solennelle protestation de Clément XIV en 1770 : « Nous prions la France de conserver intacts les droits du Saint-Siège sur la Corse, car l'alto dominio sopra quest'isola appartiene al Romano Pontefice. » Le pape Grégoire VII dit à peu près la même chose: « L'île que vous habitez n'appartient, par droit et propriété, à aucun autre mortel et à aucun autre pouvoir que la Sainte Église Romaine. » D'ailleurs, tout cela perdure. Comme je l'ai dit, en vertu de l'article 340 du code de droit canonique promulgué en 1971, les évêques de Corse se rendent à Rome pour la visite ad limina non pas avec les autres évêques de France, mais en même temps que ceux des anciennes possessions pontificales"........................................................................

En 1769, naît Napoléon.
En 1789, des députés corses participent aux Etats-Généraux à Versailles, puis à l'Assemblée Constituante.
Ce livre passionnant contient le fac-similé de l'accord franco-génois de 1764.

samedi 1 août 2009

Une soirée à Ramatuelle

Michel Drucker nous a convié hier au soir à une grande soirée au théâtre Jean-Claude Brialy, construit à l'antique à Ramatuelle, dans le souvenir de Gérard Philipe.
Je ne sais pourquoi a été choisi la première pièce de Philippe Claudel, à ne pas confondre avec "Paul Claudel", comme je l'ai entendu.

Dans cette tragédie d'un couple, tout jaillit, la haine, la bassesse, l'immonde qui rôdent dans certaines âmes. D'une langue crue, violente, où la méchanceté éclate de toutes parts,l'auteur nous abreuve jusqu'à la nausée. Heureusement que la litanie des vacheries que s'envoient les deux acteurs, à la longue, nous a parfois endormis, puis brutalement un éclat, et nous reprenions le cours de ce pugilat brutal.
Philippe Claudel ne pèche pas, oh que non,par la finesse. Nous sommes loin de l'intelligence, la vitalité heureuse d'un Shakespeare(La Mégère apprivoisée),d'un Sacha Guitry(tout son théâtre), d'un Molière(qui dit tout avec élégance), Giraudoux, etc.
Le dénouement était factice, après la vomissure, le couple se réconcilie sur l'oreiller. La fin de cette histoire ne pouvait être que la séparation ou la tragédie.

Une note, la pièce a été sauvée par les deux brillants interprètes des rôles de la femme et du mari. Michel Leeb a apporté sa démesure tragique dans ce faux comique. HZ

samedi 4 juillet 2009

Michael Jackson, l'idole de la génération "Pop-Trash"

Mort de Michael Jackson à 50 ans, en pleine répétition du show qu’il devait faire à Londres. Arrêt cardiaque probablement dû à une fatigue intense qu’il n’a pas ressenti à cause de calmants et d’excitants. En se remodelant le visage pour devenir « autre », une sorte d’extra-terrestre, qui n’avait plus rien à voir avec son enfance, son adolescence, sa jeunesse. Avec la chanson, la danse, le Moonwalk, l’adulation de toute une génération à travers le monde, il s’est « senti » ou « cru » différent, surnaturel. Sa vision toute fixée sur la création musicale et le spectacle l’avait grisé, emporté comme un E.T. sur une autre planète. Il croyait à son éternelle jeunesse, à ses perpétuels trente-ans, ou peut-être vingt-ans. Sa jeunesse est maintenant fixée sur des images qui passeront et repasseront comme celles des grands chanteurs. (texte du 4 juillet 09)

lundi 15 juin 2009

RAMON de Dominique Fernandez, Grasset,

«Je suis né de ce traître, il m'a légué son nom, son œuvre, sa honte.» Ainsi Dominique Fernandez parle-t-il de son père, brillant intellectuel de gauche devenu collabo en 1940.L'"enfant terrible" pourrait-être le sous titre à ce livre très intéressant. "Enfant terrible" par sa vie avec son épouse, les siens, le monde littéraire et intellectuel qu'il fréquente dans les années de l'entre-deux guerre. Parrainé par Marcel Proust,il entre dans le giron de l'intelligentsia de l'époque, et mène une vie brillante entre l'alcool, les rutilantes bagnoles, les soirées, les dîners, les vernissages etc. de la vie parisienne, rive gauche. Dans cette fantastique et dramatique époque où l'on voit naître, s'épanouir et exploser les idéologies meurtrières du marxisme-léniniste (1917), du fascisme mussolinien (1921) du nazisme hitlérien (1931/1933), la France est divisée en deux. Les tenants intellectuels de la gauche révolutionaire ou parlementaire, les tenants de l'ordre bourgeois et parlementaire. la gauche contre la droite. La première se coupant en deux(1921-Congrès de Tours) entre communistes et socialistes pacifiste(Blum), la seconde se clivant entre légitimistes nationalistes(Action française, camelots du roi à relent dreyfusard(Maurras),et républicains, radicaux et radicaux-socialistes, pacifistes(Briand : Plus jamais la guerre!)
Ces deux courants sont unanimes, en 1940, dans la guerre contre l'Allemagne hégémonique et nazie.
A la défaite de 1940, les cartes se redistribuent: se forment : le front des libéraux-républicains-nationalistes, et le front des collaborateurs(qui va capter le pouvoir avec Pétain, en l'affublant de "Etat Français") et qui va réunir tous ceux qui haïssaient le régime républicain parlementaire et l'idéal de 1789. De ce clivage on verra des transfuges passer d'un camp à l'autre. Ramon Fernandez fut de ceux-là,plongeant avec Drieu La Rochelle, Brassillach et d'autres dans la collaboration meurtrière, tandis que d'autres ralliaient le camp de la Résistance et de la lutte à outrance aux côtés des Alliés.
Ramon Fernandez joue sa vie dans l'illusion, en suivant, dès avant guerre, Doriot, ex-député communiste, dans le P.P.F. qui sera à la base de la Milice vichyssoise.
Terrible dérive, pour un "enfant terrible", qui a connu, fréquenté, des esprits éminents, comme Gide, Mauriac, Malraux etc., écrit des livres importants.
Comment cet homme de tous les dons a-t-il pu sombrer dans une telle ignominie ?
Participer indirectement peut-être, mais participer quand même, par ses écrits, aux atrocités nazies.
Dominique Fernandez a écrit le livre de son père, comme Dominique Jamet dans "Un Traître", a écrit sur son père.
Celui de Dominique Fernandez est imposant, fouillé, archivé, dramatique. Un ouvrage de référence pour cette période, comme "Les Mémorables" dans son genre, de Maurice Martin du Gard.
Le style est clair, "code civil" comme l'aimait Stendhal.C'est une oeuvre de magistrat instructeur douloureux,mais d'une beauté triste.

jeudi 4 juin 2009

Le Disciple, roman de Paul Bourget, Transbordeurs Editions

Le personnage principal, Robert Greslou, se cherche des excuses par des contorsions philosophiques en impliquant les théories sur la psychologie d’un philosophe, Adrien Sixte, qui l’auraient influencé et manipulé.
Ce roman écrit, très bien écrit, entre 1888/89, démonte le cheminement du raisonnement d'un jeune homme qui se laisse prendre à un jeu de l'intellectualisme désincarné, qui va le conduire à un résultat tragique. Dostoievsky dans "Crime et châtiment" avait traité du même thème.
Ce sont des livres prémonitoires de la fin du 19°siècle, qui décrivent les dérives de ceux qui vont se laisser prendre aux pièges des idéologies à commencer par le nihilisme. Idéologies qui vont provoquer les grandes tragédies du XX° siècle.

vendredi 22 mai 2009

Où est Jean Giraudoux ?

L'autre jour, je voulais lire une page ou deux, ou un livre d'une fraîcheur totale, léger, ironique et gai, pour me désembrumer l'esprit avec ce matraquage télévisuel et la flopée de livres sinistres d'aujourd'hui, je décidais donc d'aller chercher un roman d'un auteur délicieux : Jean Giraudoux. Je suis allé à la Médiathèque et rien, on ne m'a tendu qu'"Eglantine", c'est tout! Il n'y avait à la Médiathèque que ce roman de Giraudoux. Etonné, j'ai fait un tour chez Privat, et là, la jeune responsable ne m'a tendu que trois de ses pièces de théâtre : "Ondine", "La Guerre de Troie n'aura pas lieu", "Electre",et d'un ton dédaigneux elle a ajouté: "C'est pour les scolaires!" Comme si elle sousentendait que c'était un auteur pour des nuls!
Je me suis rebattu sur "Eglantine", et je vais tout faire pour dénicher quelques autres romans de ce merveilleux auteur.
Henry Zaphiratos

Le compagnon de voyage, de Curzio Malaparte, Editions du Quai Voltaire 2009

C'est le texte d’un scénario retrouvé cinquante ans après dans les archives de CINES, une société italienne cinématographique d’Etat. Les images défilent avec des scènes vivantes et prenantes de l’Italie du chaos de la guerre (1943). Dans un fortin face à la Sicile envahie par les Alliés, un petit groupe de soldats commandés par un jeune lieutenant résiste au débarquement américain. Toute la troupe est décimée, le lieutenant en mourant fait jurer à son ordonnance de ramener son corps à Naples où vit sa mère, une princesse napolitaine. Le jeune soldat traverse le sud de l'Italie en proie à la guerre, à la débâcle et à la misère, rencontre une jeune italienne et à travers des péripéties dramatiques et picaresques va atteindre Naples. Et là, il découvre que la mère de son lieutenant n'est en réalité qu'une affreuse bonne femme plus ou moins maquerelle. Il lui abandonne le corps de son fils dans la caisse qu'il a confectionnée et s'enfuit avec sa compagne, vers le Nord,le Piémont d'où il est originaire. Un récit brillant, vif et dramatique. Les images sont là. On regrette qu'un Anthony Quinn n'ait pas tourné un film de ce scénario sous la direction d'un grand cinéaste italien des années 1950.
Malaparte : "Kaputt", "Technique du Coup d’Etat" à la fin de sa vie avait rejoint le Parti communiste italien, et s’était converti au catholiscisme. Il aurait été surpris de l’effondrement brutal du communisme sous Gorbatchev. Il a vécu toutes les péripéties de l’histoire italienne et européenne de la première moitié du XX° siècle, avec la Grande guerre, Mussolini, Hitler, la guerre sur le front russe, puis la débâcle italienne, et entre temps il a connu la prison en même temps que la gloire. C'est près de sa villa dans l'île de Capri que Brigitte Bardot a été filmée dans "Le Mépris". Henry Zaphiratos

mardi 5 mai 2009

A propos des "OLYMPIQUES" de H. de Montherlant

«Les Olympiques » de Montherlant. Texte dépassé, (suite aux Jeux Olympiques de 1924, de Paris) qui laisse un sentiment étrange de ton forcé, d’homosexualité transparente, derrière la découverte trouble par un jeune bourgeois coincé du début du XX°siècle, sortant d’une éducation religieuse et conventionnelle, du corps, de la nudité sous le couvert de l’émotion artistique, du sport, de la virilité, de la domination de soi, etc. Thèmes que les jeunes Allemands exalteront dans les Jeunesses Hitlériennes, et qui éblouira les jeunes petits-bourgeois de la province française, lorsqu’ils découvriront les têtes blondes émergeant des Panzers. Le style du texte est emphatique, truffé de référence aux auteurs antiques. Très loin des plaisirs du sport, et de la vitalité de la jeunesse que véhiculeront les documentaires et les actualités des Etats-Unis.
Avec mes camarades de classe, nous faisions du « sport » sans le savoir avec le foot, le basket, le ping-pong, le cross-country, les descentes vertigineuses en vélo, les longues marches en chantant, les compétitions dans les rivières ou à la piscine… Et aujourd’hui, le sport est partout, dans sa simplicité. Je ne parle pas du sport « commercial et publicitaire », qui lui, pousse à la compet. pour l'argent.

lundi 27 avril 2009

Une Rencontre, de Milan Kundera, Gallimard

Livre monologue.
Milan Kundera nous entretient de certains écrivains et poètes de l'Est, à l'époque de la dictature communiste; notamment de ceux de l'ex-Tchécoslovaquie(partagée aujourd'hui en Tchéquie et Slovaquie), qu'il a quittée. Il nous livre ses réflexions, tirées d'articles qu'il a écrits pour différents journaux ou magazines, sur les peintres moderne comme Bacon, la musique moderne comme celle du Grec, Xenakis, dont, ( il cite), Olivier Messian disait qu'il composait une musique nouvelle, hors de toute attache avec les règles musicales antérieures, sur des auteurs comme Curzio Malaparte, et son "Kaputt", chef d'oeuvre de la littérature italienne, sur la Comédie Française, où les acteurs pour faire "moderne" s'abstiennent de prononcer le "e", etc.
D'un intérêt limité.
Henry Zaphiratos

lundi 20 avril 2009

"Le Monde des Livres" Suggestions à Mme Raphaelle Rérolle

Concernant les pages du "Monde des Livres" suggestions adressées à Mme.Raphaelle Rérolle le 20/04/2009
Merci pour l'accueil fait à mes modestes remarques.Puisque vous en êtes à la réflexion sur ces pages, puis-je vous donner mon sentiment ?
Le voici : Peut-être serait-ce bon de diviser la littérature francophone, en trois rubriques fixes :a) littérature populaire - Romans policiers, romans sentimentaux - aventure-mer- science-fiction- du terroir(genre Ecole de Brive, ou livres centrés sur la province genre Ouest France, Michel Le Bris, Editions du Midi etc. )
b) littérature d'"informations-connaissances", comme les essais ou publications historiques, philosophiques, religions, politiques, scientifiques, "classiques", événementielles(style "Betancourt" ou "mémoires des acteurs, des hommes politiques etc.) c) littérature de création, à faire connaître, comme les livres qui font date pour leur contenu comme pour leur forme (style, originalité) sans tomber dans le compassé de la rue d'Ulm, prof, instit, ou agrégé( qui rentre dans la catégorie b info-connaissances.)
Cette dernière catégorie avec des EXTRAITS des livres choisis, pour l'appréciation du "style", du "mouvement de la pensée".
La littérature étrangère sous son propre "chapeau"Idem pour la BD.Idem pour les Beaux-Livres d'art.En basic : A) un article ou deux, toujours placés au même endroit (en bas de page, peut-être) mais écrit par une ou deux "plumes"
avec style, recherche, raffinement, si possible avec une "griffe" (Pas d'écriture dite "blanche" sans saveur, fade, inutile) B) Une rubrique "Théâtre" serait appréciée pour les pièces créées et leurs auteurs vivants. Laissant au "Monde" soi-même, le soin de la rubrique "critique théâtrale" pour toutes les autres formes de spectacles.
C) Une grande rubrique pour la vie de l'édition, les libraires, les salons du Livre, les auteurs vivants etc. Bref, penser "pages vivantes", dynamiques, montrant la richesse et la diversité de la création littéraire francophone. Celle qui est étrangère est déjà abondante, et c'est normal, les écrivains français ne représentant que quelques % de la production mondiale.Etant un journal littéraire parisien et national, et francophone, "Le Monde des Livres" plaira, à mon avis, davantage en prenant une place plus grande dans le paysage de la création.
Un petit mot, si vous le permettez, concernant la critique des livres : 50 à 60% des textes actuels présentent, rappellent, situent, l'auteur, (anglo-saxon très souvent) dans sa vie, ses lectures, le petit reste parle du livre que l'on devrait critiquer. Cela donne l'impression :a) que le critique n'a pas lu le livre, et cela se comprend, il y en a tellement, et il a autre chose à faire.b) qu'il ne se sert que du dossier que l'attachée de Presse de l'éditeur lui remet, qui vante les tirages dans le pays d'origine ou dans le monde (sous-entendu, le critique se dit : je n'ai pas à me fouler : le livre marche, l'auteur est aimé, alors cela va marcher en France forcément cqfd.) Une telle attitude marquerait la fin de l'originalité pour le formatage des esprits, et provoquerait le rejet.En espérant que vous ne serez pas choquée par ces quelques réflexions, je vous prie de bien vouloir recevoir mes salutations les meilleures. H.Z.

mardi 14 avril 2009

"Sans remède" Montherlant 1924-1927

Je relis quelques pages de ces textes de Montherlant, qui vont de la vente de la maison de Neuilly de ses parents, à la mort de sa mère, de la destruction de tout ce qui faisait ce passé, jusqu'à la fin de son périple méditerranéen, en 1927, où il a "tourné" en Espagne, en Algérie, Tunisie, Italie... (pas en Grèce), à la recherche de lui-même, du "désir" et du plaisir. Pages écrites à la va-vite, camouflant entre les lignes son "moi" profond, déchiré entre une volonté de rejet du catholicisme avec sa notion du "péché", et l'appel de la vie, qu'il intellectualise au fil des pages, avec, par-ci par-là, des annotations saugrenues, parfois intéressantes, parfois agaçantes. Cependant on y découvre la volonté et le plaisir de faire une oeuvre littéraire, et son style suit le mouvement de son âme, de ses détestations ou de ses amours.
Lecture pas vraiment "nécessaire".

dimanche 5 avril 2009

"Littéraire ou pas littéraire ?" Controverse chez Laurent Ruquier, samedi 4 avril 09

Eric Zemmour et Eric Nauleau ont durement critiqué le livre que venait présenter Patrice Leconte, sur l'homme qui aimait les femmes aux cheveux courts, publié chez Albin-Michel.
Leurs attaques ont porté sur l'aspect "non littéraire" de ce livre. Nauleau allant jusqu'à dire que c'était un livre "inutile". Tous deux arguant qu'ayant baigné dans les oeuvres classiques, ils ne pouvaient supporter un texte aussi mal écrit, sans style etc. Nauleau, pour "l'achever" citant, en comparaison, une strophe d'un poème de Charles Baudelaire.
Je n'ai pas lu ce livre, mais je pense que l'attitude des deux Eric était exagérée.
En réalité, opposer un livre "littéraire" à un autre "non littéraire" tient de la gageure. La langue et le style évoluent continuellement, et citer Balzac, Chateaubriand ou Maupassant, c'est vouloir "frigidifier" ce qui ne l'est pas. Ainsi Rabelais, ou Céline, Mauriac ou Giraudoux etc., ont tous un style qui est le leur. Aussi prétendre que l'un ou l'autre des auteurs d'aujourd'hui n'est pas "littéraire", est audacieux, et à la limite, un non-sens. Je pense qu'en nuançant, les deux Eric auraient pu dire que cet ouvrage de Patrice Leconte, bénéficiant d'un lancement important, en démarrant chez Ruquier notamment, était une formidable opération de marketing, autant qu'une "opération" d'écrivain. Les yeux brillants de curiosité des jeunes acteurs présents, sur "cet homme qui aimait les femmes aux cheveux courts", en disaient long sur la suite de ce lancement.
En revenant sur cette soirée, je ne puis que dire que j'ai été un peu choqué par la petite "mise au pilori" par les deux Eric de Patrice Leconte, d'autre part brillant metteur-en-scène, qui a pris l'initiative de faire "déménager" les deux superbes girls du Crazy Horse, qui encadraient le couple d'intellectuels, pour les placer dans son camp, et laisser les deux Eric, isolés, un peu désemparés devant la salle, et des centaines de milliers de téléspectateurs, dans une sorte de pilori médiatique.
Je pense que leur rôle ne peut plus être que celui d'évaluateurs du succès possible d'un livre, en parlant du fond de l'ouvrage, et en évitant de parler du style, de la forme.
Depuis trente ou quarante ans, la mode est au style "journalistique", à l'écriture blanche, à l'image nue, aux situations, au "hard" et non plus au "soft".
Ce n'est plus l'esprit, ou le coeur qu'il faut toucher, mais les instincts primaires, auxquels la télé, les I-phone,
le Wi-Fi, Internet, nous ont abonnés.
Puis-je ajouter cependant qu'aucun livre n'est inutile ?

jeudi 12 mars 2009

La Grande Librairie de François Busnel du 12 mars 09

A l'occasion de l'ouverture du Salon du livre 2009, François Busnel a réuni des écrivains autour des thèmes : "Quel livre préférez-vous ? " et "Quel livre détestez-vous ?". Il est remarquable que les participants francophones :Amélie Nothomb,Frédéric Beigdeger, Fabrice Mabanckou, Philippe Besson, Charles Dantzig, ont tous aimé un classique du passé, comme Tristan et Yseult, La Princesse de Clèves, Jacques Le Fataliste, Les Confessions de JJ Rousseau, l'oeuvre de Sade, etc. MAIS AUCUN D'ENTRE EUX N'A CITE, un écrivain du XX° siècle, ( à l'exception "bateau" de Proust et Céline) ou contemporain. Ce qui dénote une jalousie féroce à l'égard des grands écrivains de ce vingtième siècle(Malraux, Mauriac, Montherlant, Marguerite Yourcenar, Maguerite Duras, Jean Anouil, Sacha Guitry, Julien Gracq, etc) et un mépris total pour leurs contemporains. S'ils citent un écrivain d'aujourd'hui, c'est pour citer un japonais, ou un américain, ou Joyce, mais aucun écrivain francophone !
C'est dramatique, car ils reconnaissent implicitement que la production actuelle est nulle. Les écrivains, leurs contemporains édités, des scribouillards sans génie, des raconteurs d'histoires dont la seule notoriété est dûe aux médias.
L'Académie française en son temps avait refusé le grand Charles Trenet, pour... recevoir en son sein, aujourd'hui, J-L. Dabadie !

dimanche 1 février 2009

Le Pont aux oiseaux d'Antoine Audouard

Livre sur l’Indochine, plus précisément la Guerre d’Indochine, et j’ai été frappé par la très grande difficulté d’écrire sur ce sujet après l’œuvre de Lucien Bodard. L’extraordinaire c’est que n’arrivent pas à émerger la beauté et la douleur héroïque des jeunes gens qui partis pour la guerre contre le Japon, se sont trouvés face à un ennemi inattendu, et aux pièges d’une guerre révolutionnaire et d’indépendance, une « fausse guerre » où les mêmes valeurs de liberté et de dignité s’affrontaient dans une lutte sans merci de terrorisme, de guérilla, de guet-apens, à travers la beauté sauvage d’une terre riche en civilisations, baignée par les esprits des ancêtres, des revenants, des âmes errantes. Comment rendre la fascination de jeunes hommes dans cette atmosphère unique, où la sauvagerie était celle du désespoir et de l’espoir emmêlés ? Bodard a saisi en virtuose les hauteurs pathétiques des hauts-fonctionnaires et gradés, mais l’âme profonde, la formidable camaraderie, les espérances vaines ? Tout ceci ne ressort pas de ce livre.
C'est vrai qu'il y a le témoignage de Roger Delpey "Soldats de la boue", qui reste une oeuvre réussie et un témoignage sur cette période. HZ

Suite française de Némirovsky

Ecœuré par l’atmosphère effrayante de débâcle, de démission, du foutoir français devant l’occupant allemand. Comment ayant respiré cela, elle n’a pas fui avec son mari et ses enfants en Suisse comme elle en avait la possibilité avant d’être arrêtée ?
Vraiment la fin d’un monde, qui passe de la vitale création de l’Entre-deux guerres, au morne moral et social brisé de l’Occupation. La seule chose qui semble avoir préoccupé les esprits, la lutte des classes, et de là, la totale démission de l’armature morale et politique.
Du courage époustouflant d’un de Gaulle qui a vraiment incarné le refus.
En Indochine, nous gardions une certitude totale en la victoire, et jamais, nous n’avons pensé à une telle lâcheté et à un tel abandon de l’esprit national et civique à 14.000kms !
Ce livre est à jeter après l'avoir lu.
Une révélation, l'élégance et la délicatesse des dirigeants d'Albin Michel, à l'époque, qui ont toujours soutenu moralement et pécuniairement, les enfants dont les parents avaient été livrés aux Allemands par les gendarmes français. Parents qu'ils ne reverront plus.

Luna Park de Bret Easton Ellis

Luna Park de Bret Easton Ellis :
Comment faire un succès d’édition avec un cocktail de drogue, de la medium classe américaine, des phobies des jeunes hommes complexés, des exigences sexuelles de leurs femmes, de l’univers friqué, et du convenu des parties de ceux qui croient compter dans la société US : le monde de l’édition, la politique, la musique branchée, le pop’art, la mode, etc. et ajouter les fantômes qui hantent la vie du héros, le relient à son passé et le projettent dans un avenir dangereux.
Avec un lancement publicitaire adéquat style lancement d’un parfum ou d’une savonnette. Une image bidonnée de l’Amérique d’aujourd’hui aux prises avec ses hallucinations.
Une merde noire.