mercredi 21 décembre 2016

Les plus belles pages de la littérature Grecque et Latine... Anthologie d'Emmanuelle Blanc, présentée par Brighelli -Coffet de Cinq livres -Gallimard -35€

"Gallimard vient donc de sortir en coffret une anthologie significative de ce que ces quinze siècles de culture ont produit de plus beau en poésie, théâtre, histoire, roman, philosophie et éloquence. Cinq volumes réunis en un coffret élégant, pour un prix somme toute modique (35 euros). Au prix par page, ou par siècles, c'est bradé ! Bien sûr, les textes sont traduits : mais ils sont une extraordinaire incitation à entrer dans la langue, dans la culture.
Il n'est pas toujours simple de réunir les textes d'une anthologie, pour m'y être risqué parfois, j'en connais toute la difficulté. Au sens propre, le mot anthologie signifie « bouquet de fleurs » – de fleurs de rhétorique, bien sûr. Le sommet du bouquet. Ce que le champ littéraire peut offrir de mieux. Mais pourquoi telle page, et pourquoi pas telle autre ? Imaginez que vous deviez réduire Victor Hugo à quelques textes… Lesquels choisiriez-vous ? Quand il s'agit de Sophocle ou de Platon, le problème est encore plus ardu, compte tenu de la distance culturelle.
Emmanuelle Blanc, qui a consacré une année de sa vie à choisir les fleurs et à les arranger en bouquet, a fait un travail remarquable, pesant chaque choix, consentant à d'intelligents sacrifices pour conserver l'essentiel.

Pourquoi les Grecs et les Latins ?

Dans une chronique déjà ancienne, où je pestais contre le crime contre la culture perpétré par les concepteurs des nouveaux programmes et celle qui les a inspirés, j'expliquais que les élèves sont – comme nous – « des nains sur les épaules des géants », nanni gigantum humeris insidentes. Les géants, c'est-à-dire tous les bons esprits qui nous ont précédés. Ce que nous devons à l'Antiquité est précieux et inouï : non seulement les formes, mais une civilisation entière. Non seulement des chefs-d'œuvre, mais une incitation à bien nous conduire – à respecter par exemple la patrie, dont Grecs et Latins avaient une idée superlative.
J'ai voulu expliquer cela dans la préface que j'ai écrite pour cette anthologie. Après tout, si 300 Texans ont résisté jusqu'à la mort face aux Mexicains de Santa Anna en 1836, n'est-ce pas parce que 300 Spartiates avaient tenu bon – jusqu'à la mort – face au déferlement de l'armée de Xerxès en 480 av. J.-C. ? Et si l'on n'enseigne plus Hérodote dans nos collèges et lycées, comment les jeunes gens d'aujourd'hui résisteront-ils au déferlement des barbares présents ou à venir ?
Vers la fin de Drôle de jeu, l'un des plus beaux romans écrits sur la Résistance, Roger Vaillant compare ses camarades de lutte aux 10 000 hoplites, commandés par Xénophon (qui raconte leur histoire dans l'Anabase), qui traversèrent le royaume perse en 410 av. J.-C. en résistant à toutes les attaques des troupes d'Artaxerxès II.
Oui, résister – résister au déferlement de la médiocrité institutionnalisée, résister à la démagogie meurtrière, résister à l'égalitarisme qui consacre en fait les inégalités. Il faut pour résister faire flèche de tout bois – et offrir aux jeunes et aux moins jeunes le témoignage de ce qui est le fondement de notre culture, à défendre bec et ongles contre le nivellement par le bas voulu au ministère, est non seulement une belle action, mais une bonne action – kalos kagathos (καλὸς κἀγαθός), dit-on en grec."

Présentation de Brighelli (in Le Point)

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