mardi 15 janvier 2013

Fabrice Lucchini chez Frédéric Taddeï

Lucchini plus Lucchini que lui-même. L'amoureux de la langue française, l'amoureux des grands textes, des grands auteurs Céline, Chrestien de Troyes, Flaubert, La Fontaine, Paul Valéry... Il s'emballe, se calme, repart de plus belle, cite, cite... Il étouffe dans l'encens des mots de la langue française, dans le rythme propre à chaque auteur, au phrasé, à la délicatesse, à la robustesse de la pensée. Luchini est plus qu'un amoureux, c'est un passionné, et un passionné de la restitution du texte en lui-même..."Serviteur, monseigneur, serviteur". Voilà c'est un serviteur émérite,extraordinaire car il en tombe en France rarement, comme des extra-terrestres, des E.T. de la langue. D'un coup il fout tout par terre, le nouveau roman, les titillements intellos, les précisiosité à quatre sous, la platitude, la monotonie, l'étiolement de la langue, des romanciers, des écrivains. Il a besoin du charnu, du brillant, de l'époustouflant dans la pensée et le style, une sorte d'ogre de l'art de la découverte des textes. Il met son vaste public étonné, découvreur, pisteur en suspension sur une idée, sur un mot, sur une phrase sur un auteur. Lucchini ce n'est pas un écrivain, c'est plus que tous ceux qui écrivaillent aujourd'hui, peinent à ramasser des idées, des mots, des phrases, s'échinent pour trousser des histoires à vendre à la télé au cinéma, dans la banalité des mots sans âme. Il y a eu et il y a de merveilleux professeurs, artistes, comédiens à la diction quasi parfaite, mais Luchini, hors de ses emballements nerveux, lorsqu'il se maîtrrise reste unique, comme le furent Louis Jouvet, Louis Salou... Il permet de redécouvrir les textes jetés au rebut par la fausse modernité de l'Education nationale, l'outrageuse et insensée conception de la déstructuration de la pensée et du style, "fauteurs" de la pensée bourgeoise, pour l'accession de la "masse prolétarienne" à la culture du pathos, de la culpabilisation ! Conception d'une élite dévoyée de politiciens bourgeois enrichis à la M. Jourdain qui veulent faire de la culture comme on fait des perles, rondes, sans originalité, sans mouvement, à la Kim Il Song, à la Staline... Mais il y a toujours des dissidents, qui ouvrent la voie, des Soljenitsine, des Victor Serge, des Malraux qui veillent, éclatent soudain dans des jaillissements de lumière, d'éclairs, ils aveuglent brutalement, et tout est changé.... les auteurs à la mode, les pensées à la mode éclatent comme des bulles de savon, les gens se remettent à penser, se remettent à rythmer leur vie. On les entend venir dans le silence de la nuit, sous les grand soleil de la voix des Luchini.
Mais qu'il ne fasse pas du "Lucchini", sa grande tentation; là on ne le suit plus.
Son nouveau film avec Lambert Wilson sort demain. Espérons que Wilson ne lui serve pas de faire-valoir.
Henry Zaphiratos

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