mercredi 30 avril 2014

Un bon fils de Pascal Bruckner, récit - Grasset 264p. 18€

La mode est au récit autobiographique que ce soit à l'étranger ou en France. Ainsi hier je parlais de Paul Auster, et de son Excursion dans le roman de sa vie, ici, c'est Pascal Bruckner qui part de son enfance catholique, de sa tentation pour la ferveur religieuse d'enfant de choeur pour la prêtrise et de son évolution marquée par le contre-pied qu'il prend vis à vis de son père, ingénieur, gueulard, antisémite, admirateur de l'Allemagne hitlérienne, devançant le STO pour travailler chez Siemens en Autriche... Ce qui le poussera à envoyer son fils, Pascal, s'y faire soigner, et apprendre l'allemand... Pascal Bruckner écrira ce livre au lendemain de la mort de son père, père détesté, honnis, mais qu'il "suivra" jusqu'à la fin de sa vie. 
Une partie de la jeunesse bourgeoise s'est toujours construite en opposition à la famille, au père dominateur, éructant, à la mère soumise, acceptant cette domination... Les enfants "victimes" assistant passifs, interrogatifs, avant que d'être révoltés, de prendre le contre-pied de cette sinistre bourgeoisie. Gide écrivait déjà "Famille, je vous hais !", Sartre la détestait, Hervé Bazin a donné une auto-fiction terrible dans "Vipère au poing"... Lénine se soulèvera, les Staline, Pol Pot, Kieu Sampham, enfants de bourgeois, etc iront jusqu'aux tentatives d'extermination de la bourgeoisie en génocides de masse...
Nous sommes loin de "Mon père ce héros..." de Victor Hugo, des belles pages de Chateaubriand sur son père et les siens, de Marcel Proust, Marcel Pagnol... On a l'impression qu'une rudesse, un côté "plouc" , vulgaire a envahi l'âme de certains êtres, a détruit leur face lumineuse... Les idéologies meurtrières se sont construites à partir des rancoeurs, de la haine, et ont voulu tuer le "père"...
Mais "pères", ils le deviendront... les générations se suivent, les colères recuites se transmettent, font des livres, des témoignages. On témoigne de la souffrance, on ne témoigne peu du bonheur... On témoigne de ce qui dérange, achoppe, meurtri... On a comme honte de dire que l'on a été heureux... Pour construire une réflexion, un livre, c'est comme un cheminement pour sortir des ténèbres, de ce que l'on ne comprend pas, de ce que l'on rejette, pour aboutir à soi-même...
"Les gens heureux n'ont pas d'histoire" dit le dicton...
C'est pourquoi ces livres se terminent bien, par un "Happy end" : l'enfant, l'adolescent, devenu adulte a conquis son monde, il domine sa vie, et regarde avec un certain orgueil ce qu'il est devenu, grand romancier, grand reporter, "Grand tyran" parfois, et jette un oeil de compassion, parfois de mépris sur ce monde qui l'a entouré et d'où il s'est extrait, qu'il domine et veut contraindre... La guerre politique succède à la guerre morale, la domination des "fils" sur le "père" que l'on renverse... en tragédies ou en livres.
Hermès      

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