lundi 1 février 2010

D'autres couleurs de Orhan Pamuk, Gallimard "essais" 554 pages, 2009

Ce livre est très intéressant à l'heure où la Turquie frappe à la porte de l'Europe. Il montre toute la fascination qu'exerce la France et l'Occident avec leur littérature, leur mode de vie, les libertés individuelles, la démocratie, leurs films, leurs avancées technologiques etc. sur les autres peuples du monde.L'auteur a écrit une trentaine de livres dont plusieurs ont été des best-sellers en Turquie et dans le monde, et certains primés. Pour couronner son oeuvre, le Prix Nobel lui a été décerné en 2006.
Du haut d'une fenêtre sur le Bosphore, il contemple la rive orientale ou asiatique d'Istambul, qu'un gigantesque pont aujourd'hui relie à la rive européenne, et il soupèse le poids des blocages, des interdits, des coutumes qui entravent la vie de ses concitoyens. L'Empire Ottoman après la prise de Constantinople en 1453, a jeté sa machine de guerre pour conquérir toute l'Europe et imposer sa domination. On sait que cette ambition a été brisée à Lépante, Vienne, Navarin. Pendant que l'Europe grâce à ses chercheurs, ses littérateurs, ses savants, ses explorateurs, ses conquistadores se projetait vers l'avenir, la monarchie ottomane s'entourait d'interdits, de complaisantes facilités, et restait rivée au Moyen-âge, tant pour les arts(peinture, sculpture, musique),la littérature que pour la technique.
Aujourd'hui, le carcan du passé pèse sur le présent, et certains de ses compatriotes
ne rêvent que d'entrer dans l'Europe pour bouleverser leur mode de vie, et redonner souffle à leur pays. Mais les pesanteurs sont là. Une grande partie de la population
des rives méditerranéennes à l'Anatolie craint d'y perdre son âme. D'où un débat déchirant.
Orhan Pamuk au fil des pages décrit très bien cet amour-répulsion entre l'Occident et
l'Orient.
Décrivant le présent en ne tenant compte que:
du fondement de la Turquie moderne sur les restes de l'Empire ottoman, et de l'Occident du XVI° au XXI siècle,
il ne peut qu'"oublier" ou omettre, les fondements de cet Occident, qui plonge ses racines mille ans avant l'ère chrétienne, s'appropriant sans complexe les acquis éblouissants des peuples antiques,Sumériens,Akkadiens, Egyptiens du temps des Pharaons, etc.
Ce livre est une oeuvre très attachantes de cet auteur des "Deux rives."
J'ajoute qu'il y a des pages éclairantes sur son travail d'écrivain, sur sa vie familiale, sur les oeuvres qui ont "construit" sa personnalité, comme ses réflexions sur "La Chartreuse de Parme" : "J'étais étreint par une intense émotion..."
Hermès

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