jeudi 14 avril 2011

Le Quinze août en Grèce... Extrait de "Devant la mer"

"Le Quinze août, il n'y a pas d'immobilité. Melissi, (La Ruche) bourdonne de cris d'enfants, d'appels, de chants d'oiseaux, de ronflements de voiture, et tout cela rythmé par les vagues qui mordent la plage de galets. Au large le golfe de Corinthe, profond, mer intérieure où passent de rares bateaux, où la pollution semble bannie. Il y a peu de monde, seuls des privilégiés fuyant Athènes comme Nizza et Andréas. Une Grèce feutrée, petite bourgeoise comme toutes les nations d'Europe. Etrange que les rencontres ne soient pas au rendez-vous... Elles ont eu lieu il y a vingt-cinq siècles...
Le monde tourne, le miracle dort.
Etonné par l'immensité de la Grèce. Sensation de grandiose sur la route entre Corinthe et Epidaure, même sensation qu'en Californie; les montagnes plongeant dans la mer créant des golfes immenses. On ne devrait pas mesurer la Grèce en km2 de terre ferme, ce qui ne veut rien dire, mais tant de Km2 de terre ferme et tant de km2 de mer. Ces grandes forêts silencieuses entre Corinthe et Epidaure.
"Voir, tout voir !". La Grèce des chapelles, des monastères, des popes, du folklore... en un mot cache dans sa nature sublime une certaine rudesse du Grec. Le garde d'Epidaure bousculant de la voix les touristes attardés, brise la rêveuse griserie et réveille un troupeau, semblant lui rappeler qu'il est lui aussi l'un des acteurs de la tragédie de cette nuit ; le boucher de Xylocastron jette sa viande, l'oeil furibard, des allusions peu amènes dans la bouche, à l'étranger interdit, il lui rappelle, lui aussi, qu'il est là, qu'il existe et que tout ce que l'étranger admire est à lui aussi.
Quel grec ne s'est pas senti l'âme d'un parricide devant l'héritage antique ? A mort Socrate (pauvre Socrate tué je ne sais combien de fois), Platon, Euripide, Sophocle...
A mort ! Nous vos enfants nous voulons vivre !
Byzance est la douleur lancinante de tout Grec. Il avait si bien conquis l'Urbs, il s'était si parfaitement substitué à elle pour le gouvernement de l'Empire d'Orient et parfois d'Occident que l'effondrement de 1453 après huit siècles de guerres incessantes, puis la lutte souterraine pendant quatre siècles de domination ottomane lui ont donné cette force, cette rudesse, cette élégance suprême du mépris.

Mycènes : les masses imposantes de la ville d'Agamemnon, l'amplitude de la vue sur toutes les vallées, les montagnes, nid d'aigle suspendu au-dessus de l'Argolide suscitant l'univers du tout est possible, dans un monde où rien encore n'est joué, où rien n'est encore figé.
Argos : la vertigineuse grandeur du théâtre.
Nauplie : le charme, mais choqué par le grand panneau d'une banque brisant le coup d’œil de la place.
Acrocorinthe : 45°, mais le souffle de l’air reste léger. Forteresse vénitienne lancée vers le ciel de l'inutile car livrée sans combat, par traité, au Sultan ! Le Péloponnèse, la Morée, ouverte aux barbares.

Regret de ne pas aller à Mistra la sainte.

Athènes

Longue conversation avec Antoine qui hait l'atmosphère étouffante qui règne en Grèce. Rien à leur proposer sinon l'aventure de l'outre-mer ou le rêve du passé. Carayannis toujours assis, guettant le "truc" qui marchera. Il écrit et fait jouer ses pièces, ses revues ; il est tendu, le regard aigu. Les gens du cinéma le surnomment le boucher, pour ne faire que du saignant qui marche ! La fille-mère violée, l’honneur de la famille à venger etc. Ce qui parle directement aux tripes, il en rit et a bien raison. Il a un cœur de jeune fille.
Visionnage de films.
Chercher à acheter (vainement) Les Petites Aphrodites qui ont eu l’Ours d’Argent au Festival de Berlin.
Le père Z. cache sous son lit le négatif de ses films de peur que ses enfants ne viennent l’en dépouiller.
Atmosphère d’intrigues.
Le feu sous les mots.

Au large d’Eleusis, de vieux rafiots.

DELPHES : l'OMPHALOS , le Nombril du monde."
Henry Zaphiratos (Extrait)

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