mercredi 15 juin 2011

Sur la légitimité ... - note du 11 janvier 1997- Devant la mer (extrait)

Sur le choix de Chirac par François Mitterand pour barrer la route de l'Elysée à Balladur :
Probablement un réflexe Action Française, monarchiste légitimiste :"Pas d'"étranger" à la tête de l'Etat." Premier ministre, à la rigueur, il n'est qu'un exécutant, mais le "principe premier doit "sortir" du terroir. Tous les chefs d'Etat viennent de la France profonde: Lebrun, Auriol, Coty, De Gaulle, Pompidou, Giscard, Mitterand... Chirac...J.M.Benamou révèle la phrase cléf :"Maintenant, je vois clair avec Balladur, avec lui c'est la technique de l'étrangleur Ottoman. Il est tout doux, il s'insinue, il vous neutralise et puis le moment venu couic..."... On n'est pas plus clair pour rappeler que Balladur est né à Smyrne,qu'il est d'une famille d'origine arménienne, et que sa distinction, son dandysme n'y feront rien, d'ailleurs le choix de ses villes de villégiatures (Deauville, Chamonix) démontre aucun enracinement dans le terroir, alors que Jarnac, Château Chinon, la Corrèze, le Limousin ou l'Auvergne sont du pays profond.
Est-ce à comprendre qu'il y a deux France ? Celle du creuset et celle de la Périphérie ? La Gaule-romaine et le reste, c'est-à-dire les régions rattachées à la couronne capétienne que sont la Bretagne, la Normandie, l'Alsace, le Comté de Nice, la Savoie, le pays Basque, la Corse, la Franche-Comté, les D.O.M. T.O.M. etc. ? Y aurait-il un vieux réflexe qui a présidé aux élections par Congrès ou par le suffrage universel du chef de l'Etat, pour n'élire, ne faire élire que ceux qui viennent du terroir premier( la France profonde qu'on regarde au fond des yeux !) ? Il faut se souvenir du "Faites vous connaître" de de Gaulle à Georges Pompidou, des "labourages" des cantons par Mitterand, Chirac, de ceux d'où l'on vient, de ceux que l'on adopte... dans la France Première. C'est la mise en pratique de la politique itinérante du gouvernement des capétiens, allant de ville en ville, de château en château, pour rester au coeur de la nation, du peuple comme l'a souligné le Comte de Paris, notant qu'avec l'enfermement à Versailles c'était la coupure d'avec le peuple qui s'effectuait, l'illégitimité populaire qui s'installait et allait provoquer la fin de la monarchie.
D'où pour François Mitterand le rappel, par le pèlerinage à la Roche de Solutré, du rite de la Patrie, à décrypter par ses amis socialistes, et qui est le pendant à la Croix de Lorraine de De Gaulle. Aussi on comprend que la lutte qui opposait François Mitterand à de Gaulle fut de la même eau que celle qui opposa le futur Louis XI à son père Charles VII. Chacun avait son idée sur la façon de gouverner, mais tous deux sortaient du même creuset. Ainsi s'est constitué une sorte de club fermé, beaucoup plus puissant que celui de l'ENA : celui du TERROIR, et sa fonction, au moment de l'élection présidentielle : écarter les prétendants périphériques. Car si l'un de ces prétendants se saisissait du pouvoir cela serait l'aventure, l'exemple le plus éclatant est celui de Bonaparte, inéconome du sang français, poussant sa folie jusqu'à Moscou, alors qu'à l'Ouest, de l'autre côté de l'Atlantique se jouait l'avenir du monde. (La vente des territoires de l'ouest du Mississipi, de la Nouvelle-Orléans à Chicago montre combien il faisait fi des chances de la France dans le Nouveau monde).

Comment s'étonner alors, des révélations de ces derniers jours sur la mort chrétienne de François Mitterand ? Sur son désir de reposer au coeur de sa terre natale ? Les racines apparaissent étreignent les hommes, les bêtes, le paysage tout entier, forme avec le monde dont elles sont issues un corps indestructible où la chaleur de la sève se mêle à celle du sang.

Extrait de "Devant la mer", le 11 janvier 1997-

Henry Zaphiratos

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